Franciscus Asulanus Lectori
Franciscus Asulanus

Présentation du paratexte

Franciscus Auslanus, s’adressant au lecteur, fait l’éloge posthume d’Alde Manuce, son beau-frère, et souligne que lui-même et sa famille perpétuent l’entreprise éditoriale en faisant paraître Eschyle.

Traduction : Malika BASTIN-HAMMOU

Franciscus Asulanus Lectori

Franciscus Asulanus au Lecteur

Qui in Aldo Sororio meo animus, qui iuuandarum litterarum ardor fuerit, neminem ego esse uestrum arbitror, qui id nesciat.

Quelle volonté a animé mon beau-frère Alde, quelle fut son ardeur à servir les lettres, il n’y a personne parmi vous selon moi qui l’ignore.

Tot ille antiquorum libros admirabili et singulari quadam diligentia emendatos quasi obsides huiusce uoluntatis suae ac testes edidit, ut nihil unquam aliud cogitasse, nihil sibi aliud, quod ageret, proposuisse, merito affirmari possit.

Ce grand homme a édité tant de livres des Anciens après les avoir corrigés avec un soin admirable et pour ainsi dire inégalé, comme s’ils étaient les garants et les témoins de sa volonté, qu’il est possible d’affirmer à juste titre qu’il n’a jamais pensé à rien d’autre, qu’il ne s’est jamais proposé d’autre but que ce qu’il faisait.

Idem hic ita eo mortuo animus in nobis haesit, ut et auctior in dies fiat, et nulli aut labores, aut sumptus sint, qui ab hoc nos queant instituto deterrere.

De la même manière cette volonté s’est emparée de nous quand il est mort à tel point que non seulement elle croît de jour en jour mais qu’il n’y a ni peine ni dépense qui puisse nous détourner de ce projet.

Vnum hoc Andreas pater, unum hoc et ego et Federicus frater agimus, uni huic rei incumbimus, ut fieri aliquid a nobis possit, quod studiosis omnibus utilitati sit.

Mon père Andreas, mon frère Federicus et moi nous agissons uniquement pour cela et nous nous appliquons à ce seul but : être utiles à tous les savants.

Neque eorum quidem nos, quae adhuc acta a nobis sunt, paenitet. Multi post Aldi mortem ex officina nostra tum Latini, tum Graeci libri prodierunt, in quibus pauca admodum desiderari posse uideantur.

Et en vérité nous ne regrettons pas ce que nous avons fait jusqu’à présent. Depuis la mort d’Alde, beaucoup de livres sont sortis de notre officine, soit grecs, soit latins, et nous avons fait en sorte qu’il y ait dedans le moins possible de choses à reprendre.

Neque tamen ulla ratione uoti compotes futuri sumus, nisi omnes plane et Latinae et Graecae linguae auctores absoluerimus.

Et pourtant nous ne sommes en aucune manière sur le point de réaliser son vœu, si nous n’achevons pas de publier absolument tous les auteurs aussi bien de langue latine que de langue grecque.

Ac nunc quidem quas Aeschyli tragoedias habere potuimus, emittimus.

Et aujourd’hui nous faisons paraître les tragédies d’Eschyle dont nous disposons.

Vt edito iam Sophocli, et Euripidi is quoque, qui reliquus erat tragoediarum scriptor, accederet. Mox multo maiora cogitamus omnes philosophos, mathematicos, historicos edituri.

Ainsi, lui qui était le dernier des auteurs de tragédies à ne pas avoir été édité s’ajoute à Sophocle et Euripide, qui le sont déjà. Nous pensons éditer bientôt des œuvres beaucoup plus importantes, nous qui avons l’intention d’éditer tous les philosophes, les mathématiciens, les historiens.

Tu lector si maximo haec tibi commodo futura cognoscis, si omni opera ac studio tuae tantum utilitati inseruimus, precare, ut ea, quae nobis proposuimus, perficere, ac bonis litteris, qua maxime indigent, ferre opem liceat.

Toi, lecteur, si tu es d’avis que ces œuvres te seront très profitables, si nous consacrons notre travail et notre application à ton seul intérêt, prie pour qu’il soit possible d’accomplir notre projet initial et de porter secours aux belles lettres, qui en manquent cruellement.