Ex eiusdem poematum libro IIII, Aeschyli tragoediarum septem argumenta.
Gulielmus Canterus

Présentation du paratexte

Édition posthume d’Eschyle imprimée en 1580, cinq ans après la mort du jeune érudit disparu prématurément ; mais l’ouvrage avait été approuvé dès 1570 par Thomas Gozeus. Canter a édité les trois tragiques chez Christophe Plantin.

Chacune de ses éditions s’ouvre sur une dédicace en grec puis des prolégomènes rédigés en latin, les arguments des pièces du volume en un vers latin, des épigrammes sur le poète ; viennent ensuite, toujours en grec, la vie du poète, la liste de ses pièces puis le texte grec de chacune des tragédies, précédé de l’argument en grec. Les vers employés sont indiqués en majuscules grecques dans le texte (ΙΑΜΒΟΙ, ΑΝΑΠΑΙΣΤΟΙ), ainsi que les antistrophes et monostrophes (ΑΝΤΙΣΤΡΟΦΙΚΑ, ΜΟΝΟΣΤΡΟΦΙΚΑ); en minuscules sont précisées l’alternance des strophes, antistrophes, les anapestes, les odes et épodes. En marge, des manicules pointent vers les sentences.

S’appuyant sur le Manuel d'Héphestion, Canter distingue les séries de vers semblables (série d’iambes, d’anapestes), les séries de vers dissemblables, qui peuvent être monostrophiques (qui combinent des mètres différents assemblés sans aucune règle apparente), ou alloiostrophiques ou systèma quand il y a peu de vers. Une troisième catégorie est constituée des séries de vers antistrophiques, où strophe et antistrophe se répondent, des séries épodiques, composées de deux strophes semblables et d’une strophe différente, et les perikommata, où deux séries de strophes dissemblables correspondent entre elles. (Mund-Döpchie 1989)

Le texte est suivi de brèves notes philologiques sur chacune des tragédies (« videtur scribendum… », « malim… », « puto Aeschylum scripsisse… ») qui renvoient régulièrement aux Novae lectiones (« Emendauimus hunc locum Novarum Lection. Lib. I »). Ses sources sont multiples ; il pratique des parallèles avec les autres tragiques, renvoie à La Souda mais aussi à Dorat (Agamemnon, note 20 p.347 « Assentior Ioan. Aurato… »), Henri Estienne (p.354 note 9 « Assentior H. Stephano »).

Parvenu aux Choéphores, il signale que le prologue, absent des manuscrits, se trouve dans les Grenouilles d’Aristophane et le restitue, ainsi qu’un argument en grec et la liste des personnages. Viennent enfin les sentences qu’il a rassemblées ainsi que celles rassemblées par Stobée, traduites en vers latins.

Conformément à l’usage établi, les tragédies d’Eschyle se succèdent dans l’ordre suivant : Prométhée, Les Sept, Les Perses, Agamemnon, les Euménides (qu’il traduit en latin par Dirae), les Choéphores, les Suppliantes, le Jugement des armes, Karès. Son apport concerne l’identification des mètres (iambes, anapestes) et de la structure métrique des chœurs. Il ne semble pas s’être servis de manuscrits, ses corrections sont ope ingenii et s’appuient sur des parallèles avec d’autres auteurs grecs. Il utilise, comme pour les autres tragiques, l’édition de référence : pour Eschyle, Vettori-Estienne (1557), la première à présenter le texte complet de l’Agamemnon. (Mund-Döpchie, La survie d'Eschyle à la Renaissance, 1984, 124-149). Il corrige en s’autorisant de la métrique, de la paléographie à laquelle il a consacré un manuel, et du sens. Mais pour les tragiques il ne disposait pas de manuscrits. Son grand apport consiste à avoir fait connaître la composition chorale. Son édition sera utilisée par Thomas Stanley en 1663.

Ce poème est en distiques élégiaques.

Bibliographie :
  • GRUYS J. A.date The early printed editions pubPlace (voir notamment p. 113-119).
  • MUND-DOPCHIE M. date, « Guillaume Canter, éditeur d'Eschyle », dans Album Charles Verlinden, pubPlace p. 233-245.
  • MUND-DOPCHIE M. date, « Histoire du texte d'Eschyle à la Renaissance : mise au point préliminaire », L'antiquité classique, 46, 1, p. 169-179.
  • MUND-DOPCHIE M. date, La survie d’Eschyle à la Renaissance¸ pubPlace (notamment p. 239-261)
  • MUND-DOPCHIE M. date, « Les éditions plantiniennes des Tragiques grecs par G. Canterus », dans Ex Officina Plantiniana: Studia in memoriam Christophori Plantini, M. De Schepper et F. De Nave, pubPlace, p. 491-504.
  • TESSIER A. date, Iter responsionis. Le dedicatorie e le praefazioni ai tragici di Tournebus e Canter pubPlace.
Traduction : Malika BASTIN-HAMMOUChristian NICOLASSarah GAUCHER

Ex eiusdem poematum libro IIII, Aeschyli tragoediarum septem argumenta.

Extrait du livre IV des poèmes du même, argument des sept tragédies d’Eschyle1.

Praecinit Ionis uaga fixus castra Prometheus. Oedipodae fratres alterno uulnere sidunt. Victus rura fugit tumidus rex Dorica Xerxes. Vxoris perit Atrides technis Agamemnon. Aegisthum matremque simul necat unus Orestes. Insontem laetus iudex absoluit Orestem. Belides Argiuam implorant cum numine dextram.

Prométhée enchaîné prédit les séjours vagabonds d’Io.2 Les fils d’Œdipe meurent sous leurs coups respectifs.3 Le fier Xerxès vaincu fuit les plaines doriques.4 L’Atride Agamemnon est tué par une ruse de son épouse.5 Le seul Oreste tue en même temps Égisthe et sa mère.6 Un juge favorable déclare Oreste innocent.7 Les petites filles de Bélus supplient les Argiens de les aider.8


1. Le texte est en hexamètres dactyliques.
2. Allusion, évidemment, au Prométhée enchaîné. Canter suit ici l’ordre de présentation des pièces dans son édition.
3. Allusion aux Sept contre Thèbes.
4. Allusion aux Perses.
5. Allusion, bien sûr, à Agamemnon.
6. Allusion aux Choéphores.
7. Allusion aux Euménides.
8. C’est-à-dire les descendantes (ici les petites-filles) de Bélos, donc les Danaïdes, dans Les Suppliantes.