Francisci Passii Carpensis Plutus Comoedia incipit Prologus
Tranquillus Molossus

Présentation du paratexte

Ce poème est en sénaires iambiques.

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Francisci Passii Carpensis Plutus Comoedia incipit Prologus

La Comédie de Franciscus Passius de Carpi, Plutus, commence ; Prologue1

Breuissimum poeta tempus expetit Ab omnibus dari salute plurima : Vt antequam loquamur hic facetias Ad hunc gregem licere pauca colloqui : Et admodum breui sermone sentiat Videbitis mox quid sibi uult fabula : Quod impetrasse me notat silentium. Quod ex utraque parte nullus excreat. Nisi senecta pressus ultima senex. Age excreet : et tussiat quantum potest : Vt audiamur inde a uobis caeteris.

Le poète réclame à tous un bref instant pour un salut chaleureux, pour que, avant que nous ne disions ici nos plaisanteries, il ait le sentiment qu’on peut dire quelques mots à ce public et lui tenir un bref discours ; vous verrez très vite ce que la pièce veut dire, parce qu’il remarque que j’ai obtenu le silence, que personne, ni de ce côté ni de l’autre, n’est en train de crachoter sauf un vieillard chargé de son ultime vieillesse. Bon, qu’il crachote et tousse tout son soûl, du moment que nous restons audibles pour vous, le reste du public !

Notate iam quid uos oratum mittimur. Oportuit minora primum scribere : Ad altiora quisquis optat ingredi. His fabulis nil est opus socordiae. Quid ergo dicet hic ex uobis quispiam Maiora uiribus suis poemata Orditur ? an uenturum se sperauerit Quo Plautus Ennius Terentius ? negat. Sed omne quicquid est in hacce fabula : Affirmat ausus esse exordium sui. In omnibus negotiis est debile : Si quod facis quod ante nunquam feceris.

Prenez acte de ce que nous sommes mandatés pour vous dire. Il aurait fallu être plus modeste, si l'on souhaite être plus ambitieux. Pour ces pièces, il faut ne pas être bête. "Pourquoi donc, dira n’importe lequel d’entre vous ici, entreprend-il une œuvre trop grande pour ses forces ? à moins qu’il n’ait espéré arriver au même endroit que Plaute, Ennius, Térence ?" Non. Mais tout ce qu’il y a dans cette pièce, il l’affirme, c'est le début de son audace. En toute affaire, tout ce qu’on fait sans l’avoir fait auparavant est faible.

Quo iussit hic poeta uersibus suis : Vt omnium subiecti naribus forent. Vt si quid in scribendo iam peccauerit : (Numquam rubori duxit se docerier) Reprehensionibus peritorum notet. Correcta non damnata dicet carmina : Quae uos subibunt iudices iustissimos.

C’est pourquoi notre poète enjoint à ses vers de se soumettre au flair de chacun, pour que toutes ses erreurs dans l’écriture (il n’a jamais trouvé honteux de s’instruire), il les amende grâce aux reprises des experts. Il réputera corrects les vers qui n’auront pas été condamnés et qui seront arrivés devant les juges très justes que vous êtes.

Ad arma uobis militem damus nouum. Qui corrigendus est si quid deliquerit. Non sibilandus hinc multis ciconiis Laudata nam uirtus solet succresce<re>. Hic incitabit ad scribendum caeteros.

Nous vous donnons un nouveau soldat pour le combat. Il faut le corriger chaque fois qu’il aura mal fait plutôt que de le faire siffler ici par moultes cigognes. Car c’est quand on l’encourage que d’ordinaire la vertu grandit. Lui incitera tous les autres à écrire.

Nec omnibus datum fuit cognoscere : Quid diferant a canticis diuerbia. Et uerba moribus concinna fingere : Vt non agat matrona partes pellicis. Non est cuiuslibet fallacem Pythiam : Stultum Simonem quae talento munxerit : Effectus mente duplices complectere. Vt sicut hic ab illa totus discrepat : Sic et concepta uerba caute differant. Videntur haec a fronte dictu mitia : Et nullius laboris esse desidi. Sed in recessu dura sunt ac aspera : Nam tempus in curando Pluto dat sibi : Timens acumen perspicacis iudicis. Quod non Aristophanem fecisse comperit. Sic ordinanda sunt quaecumque finxeris : Vt uera possint esse spectatoribus.

Et il n’a pas été donné à tous de bien distinguer la différence entre les cantica et les diuerbia, ni de fignoler des paroles qui s’harmonisent avec le caractère, en sorte qu’une femme mariée ne joue pas le rôle d’une courtisane. Ce n’est pas l’apanage de n’importe qui de se saisir d’une pythie menteuse capable de moucher cet imbécile de Simon d’un talent, de traiter mentalement les deux effets de manière que, tout comme lui se démarque entièrement d’elle, de même les mots choisis soient soigneusement différents. Cela de prime abord semble au paresseux agréable à dire et de peu d’effort. Mais dans le fond, c’est dur et difficile. Car il se donne le temps de nettoyer Plutus étant donné qu’il craint l’œil aiguisé de son juge clairvoyant lui reprochant de n'avoir pas vu ce qu'Aristophane avait fait. Il faut mettre en ordre tout ce qu’on a imaginé pour que cela puisse être vraisemblable pour les spectateurs.

Nec conuenit qui nuper hinc discesserat : Fecisse quod non exigit tempus breue. In quo Terentius mea sententia Excedit et graecos et nostros comicos.

Et il ne faut pas que celui qui vient de quitter la scène ait fait une action qui exige un temps long. En cela Térence, à mon avis, dépasse les comiques tant grecs que latins.

Sed nos tamen multum priscis erroribus Tenemur : unde cautius diuertimur. Sed quae loquor non omnibus forsan placent. Nam prologus nihil facit comoediae.

Mais nous, pourtant, nous sommes beaucoup tenus par les erreurs des anciens, dont en conscience nous nous écartons. Mais mes paroles ne plaisent sans doute pas à tout le monde. Car le prologue ne fait rien pour la comédie.

Videte iam quid caecus iste uult sibi. Si dignus est uisu uos iudicabitis. Non audietis hic amores Pamphili. Sed ut pecuniis omnes deseruiant. Comme<n>dat hanc antiquitas comoediam : Cui plurimum debere nos fatebimur : Doctrina namque nostra ab illa defluit Ridet dolet mordetque praesens fabula Quam nos uocabimus satyrocomoediam

Voyez donc maintenant les intentions de cet aveugle. Vous jugerez s’il mérite un regard. Vous n’entendrez pas ici les amours de Pamphile mais comment tous sont esclaves de l’argent. C’est l’antiquité qui recommande cette comédie, envers laquelle nous avouons l’ampleur de notre dette. De fait, ce que nous savons découle d’elle ; la pièce en cours rit, pleure, mord : nous l’appellerons satyrocomédie.

Narrabit argumenta uobis fabulae Qui primus in scaenam senex processerit Et seruus eius qui damnat fortem suam: Credens herum falso delirantem suum.

L’argument de cette pièce vous sera raconté par le vieillard qui, le premier, entrera sur la scène et par son esclave qui accuse sa fortune, dans l’idée que son patron feint d’être est en plein délire.

Valete: iam me uersipellem fecero: Et rursus huc reuertar in proscaenium

Adieu, je vais changer de peau et reviendrai ici à l’avant-scène.


1. En sénaires iambiques