Ioannes Frobenius τοῖς φιλέλλησιν εὖ πράττειν
Ioannis Frobenius

Présentation du paratexte

L’épître dédicatoire est suivie de plusieurs paratextes rédigés en grec : list

Traduction : Christian NICOLAS

Ioannes Frobenius τοῖς φιλέλλησιν εὖ πράττειν

Johannes Froben aux philhellènes, salut.

En damus Aristophanis Ranas optimi iuuenes, autorem non est quod laudemus, cuius excellentiam uel illud satis arguit, quod inter tot ueteris Comoediae scriptores solus emeruit posteritatem.

Voici que nous faisons paraître Les Grenouilles d’Aristophane, excellents jeunes gens. L’auteur ? Inutile d’en faire l’éloge : son excellence est suffisamment prouvée ne serait-ce que par le fait que parmi tant d’auteurs de l’Ancienne Comédie il est le seul à avoir gagné la postérité.

Qui Graecas literas exacte callent, existimant huius sermonis elegantiam rectius disci ex oratoribus quam ex poëtis : quod apud Latinos secus est, quibus eadem est utrorumque lingua, nisi quod in poetis maior est uerborum delectus, ac sententiarum uigor

Ceux qui connaissent bien la littérature grecque pensent que l’élégance de cette langue s’apprend mieux à partir des orateurs que des poètes ; c’est différent en latin où c’est la même langue dans les deux genres, sauf que chez les poètes il y a plus de choix dans les mots et de force dans les sentences.

Apud Graecos dices alia lingua loqui poëtas, alia qui soluta scripserunt ; sed hoc discrimine, ut qui in oratoribus sit primum exercitatus, facile assequatur phrasim poeticam. Contra secus.

En grec, on dira que les poètes parlent une langue, les prosateurs une autre, mais avec cette différence que si l’on s’est exercé d’abord sur les orateurs, on acquiert facilement le style poétique, et pas le contraire.

Caeterum Aristophanes, si choros excipias, sic in carmine praestat Attici sermonis elegantiam, ut uix Lucianus in prosa felicius.

En outre Aristophane, à l’exception des chœurs, a dans sa versification une élégance attique si grande que Lucien, en prose, fait à peine mieux

At dixerit quispiam, quid musarum mystis cum Ranis ?

Mais, pourrait-on objecter, quel rapport entre les prêtres des Muses et des grenouilles ?

Hae Ranae canunt quauis luscinia dulcius : etiamsi nonnulla uoluptatis pars perit, quod non ubique nunc sentiri potest, ad quid alludat Comicus.

C’est que ces grenouilles chantent plus suavement que n’importe quel rossignol, même si une part de plaisir a disparu, qu’on ne peut plus aujourd’hui discerner partout, celle de savoir à quoi fait allusion le Comique.

Seculum hoc habet multas obstreperas ranas, picas, camelos, porcos, bubalos, canes, qui negotium facessant bonis studiis : aduersus horum tumultus obturate aures, et his suauiloquentissimis Ranis attendite.

Notre siècle compte nombre de grenouilles à grande bouche, de chameaux, de porcs, de buffles, de chiens qui font commerce des belles lettres ; face à leur vacarme, bouchez-vous les oreilles et prêtez-les à ces grenouilles au doux babil.

Bene ualete. Basileae, ex aedibus nostris, XI.Cal<endarum> Decem<brium> An<no> 1524.

Portez-vous bien. Bâle, dans notre atelier, 21 novembre 1524.