Présentation du paratexte
Il s’agit de la troisième édition d’Aristophane publiée par les Giunta. Elle ne comprend que 9 comédies, les mêmes que celles publiées dans la princeps et dans la première édition juntine de 1515, alors même qu’en 1516 avaient été publiées, toujours chez Giunta, les deux comédies qui étaient absentes de la princeps, les Thesmophories et Lysistrata. L’auteur du paratexte 1 est Antonius Francinus Varchensis (orthographié ici Fracinus)-Antonio Franchini. Le paratexte est adressé à Benedicto Accolta, évêque de Ravenne et de Crémone. L’apport de cette édition consiste 1) en l’index qui figure juste après le paratexte 1 2) dans les scholies qui reprennent les scholies publiées dans l’Aldine et y ajoutent des scholies récentes. 3) dans l’ajout des vers 948-1011 de la Paix, grâce à la consultation du Codex Ravennas 137 et à l’aide d’Arsenios de Crète.
Autres paratextes : list
Bibliographie :-
Ole Langwitz Smith , Arsenios and Parisinus Graecus 2070, II. Franchini’s Source for Aristophanes, date -
Jean-Christophe Saladin , Le collège du Quirinal : enseigner le grec aux Grecs, in La bataille du grec à la Renaissance, pubPlace, publisher, date
Benedicto Accoltae Archiepiscopo Rauennati ac cle. VII pont. Maximi a secretis poenitiss. Antonius fracinus varchiensis. s.
Antonio Francini de Montevarchi salue Benedictus Accolta l’archevêque de Ravenne, secrétaire particulier du Souverain Pontife Clément VII.
Fuit Iampridem Pontifex permagne, maioribus nostris, haec et non spernenda, consueduto, ut quoties quis apud aliquem principem gratiam inire uellet, is illi muneri apportaret ex rebus suis, uel quas charissimas et in delitiis haberet, uel quibus illum, plurimum oblectari intelligeret.
Il y avait jadis, Archevêque, chez nos ancêtres, cette coutume qu’il ne faut pas mépriser : quiconque voulait un jour demander un bienfait à un grand de ce monde lui apportait en guise de cadeau pris sur ses biens, soit des choses qui lui étaient très chères et qu’il affectionnait, soit des choses dont il savait qu’elles le raviraient.
Hinc legimus huic dono datos pretiosissimos lapillos, illi uel ocissimos equos, huic rursus, aureas purpureasque uestes, illi uero quia bonarum artium studia sectaret, uetustissima, tum graecorum, tum latinorum scriptorum exemplaria.
Nous lisons là qu’à celui-ci ont été données des pierres très précieuses, à celui-là des chevaux très rapides, à celui-ci encore des vêtements de pourpre et d’or, mais à celui-là parce qu’il poursuivait l’étude des belles-lettres, des exemplaires très anciens d’auteurs soit grecs, soit latins.
Multi praeterea ob hanc eamdem, puto, causam, sua scripta summis etiam regibus nuncuparunt, ut Iulius Pollux ad Commodum Caesarem de grammatica, M. Vitruuius ad Augustum de architectura, Oppianus de Piscibus ad Antonium, Diophanes ad Regem Deiotarum de agricultura,1 nonnulli quoque aliorum scripta per negligentiam ad pernitiem labentia collatis in unum multis exemplaribus, in meliorem formam suo labore industriaque restituta principibus uiris dedicarunt.
Beaucoup en outre pour cette même raison, je pense, ont dédié leurs écrits aux plus grands rois, comme Pollux son Traité de grammaire à l’empereur Commode, Vitruve son Traité sur l’architecture à Auguste, Oppien son Traité sur les poissons à Antonin, Diophane son Traité sur l’agriculture au roi Dejotaros2 ; et certains, après avoir collationné plusieurs exemplaires et leur avoir rendu une meilleure forme grâce à leur travail et à leur zèle, ont dédié à des hommes éminents les écrits d’autres qui parce qu’on les avait négligés s’étaient dégradés.
Horum nos exemplum imitati, licet labori nostro legentium gratia haud quaquam par futura uideatur, ad recognitionem romanae graecaeque linguae scriptorum, curam omnium pulcherrimam, animum operamque conuertimus.
Nous, suivant leur exemple, bien qu’il semble que la récompense des lecteurs ne sera en rien égale à notre travail, nous avons consacré notre esprit et notre travail à l’examen des auteurs de langue latine et de langue grecque, occupation la plus belle de toutes.
Quaeres quanto labori nobis fuerit et adhuc futura sit, testimonio sint aliquot boni auctores, quorum scripta, iam situ obruta et ad interitum spectantia, a nobis summo labore pristinae integritati restituta, in lucem prodierunt.
Tu demandes l’ampleur du travail qui a été et qui sera le nôtre encore, qu’en soient témoins un certain nombre de bons auteurs, dont les écrits, déjà ensevelis par l’abandon et contemplant leur destruction, ont été rendus par nous à leur intégrité d’autrefois grâce à un grand travail et ont été publiés.
Inter alia recognouimus Aristophanis Comicorum omnium lepidissimi, nouem Comoedias, uere graeci candoris eloquique delitias, cum sale suo, lepore, politissimisque facetus delectet multum, sententiarum uero luminibus, plurimum prodesse possit, ad hoc Arsenis cretensis Archiepiscopi Monembasiae magna eruditione uiri acessimo iudicio usi, dum is Florentiae adolescentulos illos, quos Leo, Pont. Max. ad reparandam graecae linguae iacturam ex media Graecia accersiuerat, instituit.3
Parmi d’autres nous avons examiné neuf comédies d’Aristophane, le plus spirituel de tous les poètes comiques, qui sont des délices de clarté et d’éloquence grecques, puisqu’avec son sel, son charme et ses plaisanteries si raffinées il plaît beaucoup, mais avec ses phrases lumineuses il peut plus encore être utile, m’en étant remis pour cela au jugement aiguisé d’Arsenios de Crète, Archevêque de Monemvasie, homme d’une grande érudition, tandis qu’il instruisait à Florence ces jeunes gens que le Souverain Pontife Léon avait fait venir de la Grèce profonde pour réparer la perte de la langue grecque.
In qua quidem recognitione hoc in primis gloriari licet, nos omnium primos in Comoedia cui titulus est εἱρήνη ad sexaginta uersiculos nostra diligentia repertos restituisse.
Certes dans cet examen il est permis de se glorifier avant tout de cela : nous les premiers de tous avons restitué dans la comédie intitulée La Paix εἰρήνη environ soixante vers retrouvés par nos soins.
Has Comoedias nunc primum diligentissime excusas, commentariis auctas, atque indice copiosissimo exornatas, tuo illustri nomini Pontifex permagne dicare cogitantes, Petrus Gerius, eximia probitate uir, tibi et uniuersae familiae tuae deditissimus, nobis uero arctissima affinitate coniunctus, est adhortatus, cum eorum more qui aliorum scripta, ut paulo ante dicebamus, a se pristino candori restituta summis regibus dedicarunt, ut initam apud te iamdudum gratiam, dum adhuc adolescentulus, Florentiae acri studio bonis disciplinis operam dabas, renouaremus renouatamque confirmaremus, tum quia patrocinii quodam iure tibi tamquam musarum altori debentur litteratorum uigiliae.
Ces comédies, imprimées avec le plus grand soin, augmentées de commentaires et agrémentées d’un index très fourni, c’est à toi que, tandis que nous songions à te les dédier, Petrus Gerius, homme de la plus grande probité, entièrement dévoué à toi et à ta famille toute entière, mais uni à nous par une très étroite parenté, nous a encouragé [à le faire], non seulement à la manière de ceux qui ont dédié les écrits d’autres, comme nous le disions peu avant, aux plus grands rois après les avoir rendus à leur antique clarté ; et ce afin que la grâce initiée auprès de toi depuis longtemps, tandis que encore adolescent, à Florence, tu t’adonnais à l’étude des bonnes disciplines avec un zèle remarquable, nous la renouvelions, et nous confirmions l’avoir rénovée, mais aussi parce que par la loi pour ainsi dire du patronage, c’est à toi en tant que nourricier des muses que sont dues les veilles consacrées aux lettres.
Omitto hoc loco, iudicii tui grauitatem, ingenii magnitudinem, egregiam romanae graecaeque linguae eruditionem, fidem summam, humanitatem singularem, quibus ad promerendam hominum gratiam assidue uteris, adeo ut non immerito Cle. Pont. Max. acerrimus ingeniorum perscrutator te ex omnibus unum elegerit cui duarum Dioecesum Rauennae simul ac Cremonae curam demandaret, et quem, quod omnes admiramur, ad maiora namque procul dubio uocaris, poenitiss. arcanis admitteret, nam grauiori praeconio quam hoc breuissimo titulo uirtutum tuarum laudes celebrandas putamus.
Je passe sous silence ici le sérieux de ton jugement, la grandeur de ton intelligence, ta remarquable connaissance de la langue latine et de la langue grecque, ton immense loyauté, ton humanité unique, que tu utilises sans relâche pour rendre service aux hommes, au point que ce n’est pas sans raison que le pape Clément, en observateur très aiguisé des caractères, t’a choisi seul parmi tous pour prendre soin des deux diocèses de Ravenne et de Crémone, et, ce que nous tous admirons, parce que de toute évidence tu es appelé aux plus hautes fonctions, pour te préposer aux secrets les plus importants, en effet nous pensons qu’il faut célébrer les louanges de tes vertus avec une proclamation plus sérieuse que ce tout petit titre.
Bona igitur aui suscipe nostras quales cunque sunt lucubrationes exiguum sane munus at ex eorum genere, quae soleant hominum famam aeternitati consecrare, bonasque disciplinas, quod facis, amplexare et foue.
Reçois donc avec un bon présage le fruit de nos veilles, en guise de tout petit cadeau mais du genre de ceux qui ont coutume de consacrer pour l’éternité la gloire des hommes, et les bonnes disciplines, chéris-les et favorise-les, comme tu le fais.
Vale ac longum uiue, tuis, felix, clarus posteritati uicturus.
Adieu et vis longtemps auprès des tiens, heureux, toi qui es appelé à vivre célèbre pour la postérité.