Présentation du paratexte
Traduction latine de cinq comédies d’Aristophane.
Bibliographie :-
Thomas Baier « Nicodemus Frischlin als Aristophanes-Übersetzer » editor Dramatische Wäldchen. Festschrift für Eckard Lefèvre zum 65. Geburtstag pubPlace publisher date -
Patrick Lucky Hadley Athens in Rome, Rome in Germany. Nicodemus Frischlin and the Rehabilitation of Aristophanes in the 16th Century pubPlace publisher date -
David Price The Political Dramaturgy of Nicodemus Frischlin : Essays on Humanist Drama in GermanypubPlace publisher, date
Argumentum fabulae
Argument de la pièce
Introducit poeta quendam Strepsiaden, noctu diuque semetipsum torquentem propter debita et aes alienum a feneratoribus acceptum in quod pater se causi filii, cui equos emerat, temere coniecerit.
Le poète met en scène un certain Strepsiade qui se tourmente nuit et jour en raison d’une dette et d’un emprunt contracté auprès d’usuriers, dans lequel il s’est imprudemment empêtré pour son fils, à qui il avait acheté des chevaux.
Nam instante iam nouilunio, quo debita exigebantur, noctem iste insomnem habet.
Car comme c’est déjà la nouvelle lune, période de réclamation des dettes, il passe une nuit blanche.
Quare accensa lucerna, sumptus et debita secum supputat, filium, qui equos et currus somniabat, e lecto excitat, orat ut philosophos, Socratem et Chaerephontem adeat et ab illis sophisticam persuadendi artem addiscat.
Alors, allumant sa lampe, il ressasse les dépenses et la dette, tire du lit son fils, qui rêvait chevaux et course de chars, et lui enjoint d’aller chez les philosophes Socrate et Chéréphon apprendre l’art sophistique de persuader.
Sic enim fore ut creditoribus imponat et quod pater nihil cuique debeat illis persuadeat.
Ainsi il pourrait en imposer aux créanciers et les persuader que son père ne doit rien à personne.
At Phidippides (hoc enim nomen filio) rei equestris amore adductus, philosophicum pallorem detestatur, patrique morem gerere recusat et condicionem respuit.
Mais Phidippide (c’est le nom du fils), obnubilé par l’équitation, déteste le teint pâle des philosophes, refuse de faire plaisir à son père et repousse la proposition.
Quare senex, omni spe quam de filio conceperat abiecta, ipsemet Socratem adire et mentiendi artem, nulla aetatis ratione habita, perdiscere constituit.
Aussi le vieillard, renonçant à tout espoir du côté de son fils, décide d’aller voir lui-même Socrate et d’apprendre l’art de mentir, sans tenir compte de son âge.
Non longe progressus, ad ostium Academiae seu Lycei peruenit atque hoc pulsat et Socratem quaerit.
Sans aller bien loi, il arrive à la porte de l’Académie ou du Lycée, frappe et demande Socrate.
Discipulus domo egrediens, cognita aduentus causa, exponit seni quaedam arcana Socratis, sed ridicula, ut sunt : de dimensione saltus pulicum, de culicibus, orene an podice sonum edant et similibus.
Un élève sort de la maison, écoute les raisons de la venue du vieillard et lui révèle quelques secrets de Socrate, mais grotesques, par exemple quelle est la dimension d’un saut de puce, si les moustiques font du bruit par la bouche ou par le derrière, etc.
Quas subtilitates homo rusticus primum admiratur, deinde in scholam introducitur, ubi conspicatus forte globum caelestem et terrestrem affabre factum, nonnulla de situ urbium et insularum deque erudito puluere ridicule docetur.
Ces subtilités, le paysan commence par s’en étonner puis il est introduit dans l’école où, ayant avisé par hasard un globe du ciel et de la terre artistement forgé, il reçoit quelques enseignements grotesques sur l’emplacement des villes et des îles et sur la poussière savante.
Ibidem in calatho consistentem Socratem, quasi a terra submotum et in sublimiori loco caelum contemplantem, salutat, causam aduentus exponit, doceri cupit, mercedem sancte per Iouem promittit.
Là, voyant Socrate assis dans un panier, comme suspendu au-dessus de la terre et contemplant le ciel dans un lieu plus élevé, il le salue, expose les raisons de sa venue, réclame des leçons et promet de payer en jurant par Jupiter.
Ille Iouis audito nomine, negare esse Iouem et praeter Nubes nulla restare usquam numina.
L’autre, entendant le nom de Jupiter, nie l’existence de Jupiter et affirme que, hormis les Nuées, il n’y a plus nulle part de dieux.
Mox homine rustico, sacris philosophicis initiato, Nebulas inuocat ut hae sibi in Strepsiade informando opem ferant.
Puis, une fois le paysan initié aux mystères de la philosophie, il invoque les nuages pour qu’ils l’aident à instruire Strepsiade.
Introgressis muliebri specie in theatrum Nubibus, docet Socrates illas esse sophistarum deas, easdem tonare et fulgurare.
Entrent sur scène, sous l’apparence de femmes, les Nuées ; Socrate enseigne qu’elles sont les déesses des sophistes, que ce sont elles qui tonnent et foudroient.
Hac de causa etiam a Strepsiade adorantur eique omnem operam pollicentur Nubes.
C’est pourquoi Strepsiade aussi les vénère et les Nuées lui promettent leur aide.
Quare iterum rogat Socratem Strepsiades ut sophisticam se doceat, promittit omnem diligentiam cum laborum et plagarum tolerantia coniunctam, dummodo rabula fiat et a debitis liberetur.
Aussi Strepsiade renouvelle-t-il sa demande à Socrate de lui enseigner la sophistique, il promet d’y mettre toute son application et accepte d’avance les peines et les coups, pourvu qu’il puisse gueuler plus fort et se libérer de sa dette.
Annuit Socrates et homini suam operam promittit, exploratis tamen prius ingenii uiribus, facultate memoriae et dono facundiae.
Socrate accepte et promet au bonhomme son aide, non sans tester au préalable son quotient intellectuel, sa mémoire et ses dons d’orateur.
Postea introductum in scamno collocat et quae facere eum uelit paucis admonet.
Puis il le fait entrer, le met sur un banc et lui explique brièvement ce qu’il attend de lui.
Illis e proscenio digressis, Nubium chorus de Aristophanicis comoediis et de hac cumprimis ad spectatores uerba facit, poetam laudat, alios comicos reprehendit.
Ils quittent la scène et le chœur des Nuées adresse aux spectateurs quelques mots sur les comédies d’Aristophane et celle-ci en particulier, fait l’éloge du poète et la critique des autres comiques.
Hinc orationem ad deos conuertit et Iouem, Neptunum Solemque inuocat.
Puis le discours s’oriente vers les dieux et le chœur invoque Jupiter, Neptune et le Soleil.
Mox iterum ad spectatores conuersus, Athenienses accusat quod Nubibus sacra non faciant et ingrati sint pro Cleone, a se tempestatibus interempto.
Puis, s’adressant de nouveau aux spectateurs, il accuse les Athéniens de ne pas faire de sacrifices aux Nuées et d’être d’ingrats partisans de Cléon alors que dans une tempête elles l’avaient fait disparaître.
Hinc Apollinem, Dianam, Mineruam et Bacchum chorus adorat.
Alors Apollon, Diane, Minerve et Bacchus sont l’objet de la vénération du chœur.
Redit interim in scenam cum Strepsiade Socrates et de hominibus hebeti ingenio conqueritur, simul uaria ex ipso interrogat.
Entre temps, Socrate revient sur scène accompagné de Strepsiade et il se plaint de la bêtise des hommes et lui pose diverses questions.
At ille rogatus de cepis, semper respondet de alliis ac nihil paene in ore habet quam λόγον ἥττονα καὶ κρείττονα, hoc est quemadmodum causa inferior dicendo fieri possit superior1, sicut haec nomina interpretatur Cicero in Bruto.
Mais lui, à une question sur les champignons, répond toujours sur l’ail et n’a à la bouche que le discours fort et le discours faible, c’est-à-dire comment une cause inférieure peut par la technique de parole devenir supérieure, ainsi que le traduit Cicéron dans le Brutus.
Socrates hominem agresti ingenio praeditum monet artem grammaticam primo illi discendam, ut possit masculinum discernere a feminino.
Socrate signale au bonhomme à l’intelligence rustique qu’il lui faut d’abord apprendre la grammaire afin de pouvoir distinguer le masculin du féminin.
Ibi iocosa et lepida de nominum quorundam generibus oboritur disputatio sed inutilis et otiosa.
Là, drôle et plein d’humour, s’ensuit sur le genre de certains noms un débat inutile et oiseux.
Tandem scamno inlidere et secum meditari iubetur rusticus.
Enfin le paysan reçoit l’ordre de casser le banc et de le rejoindre pour méditer.
Sed uexatus a cimicibus, Socratem rogat ut celeriter rem expediat cuius ipse gratia aduenerat.
Mais agressé par des punaises, il demande à Socrate d’expédier en vitesse l’affaire pour laquelle il était venu.
Ille mollitiem hominis incusat et animum nunc huc, nunc illuc diuidere adeoque in omnes partes rapere iubet, ut inde uiam inueniat qua suos debitores defraudet.
L’autre incrimine la mollesse du bonhomme et le somme de diviser l’âme çà et là et de la mettre si bien en pièces qu’il puisse trouver là de quoi frauder ceux à qui il doit de l’argent.
Quare operto capite, rusticus senex mirabiles technas excogitat quibus feneratores possit in fraudem inducere.
Alors, tête couverte, le vieux paysan médite de merveilleux trucs pour pouvoir tromper ses usuriers.
Sed cum aetatis uitio nimium esset obliuiosus nec firmiter praecepta Socratis retinere posset, suadente Nubium choro, filium accersitum abit ut ipse sophisticam in schola Socratis addiscat.
Mais comme il était, à cause de son âge, incapable de mémoriser et de retenir par cœur les leçons de Socrate, sur les conseils des Nuées, il va chercher son fils pour que ce soit lui qui apprenne la sophistique à l’école de Socrate.
Aegre hunc illo pertractum et precibus minisque adactum, uix tandem adducit, forte iurantem per Iouem, castigat, narrat Socratis subtilitates et uitam sordidam, ad extremum Socrati eundem commendat et bona spe utrinque accepta recedit.
C’est avec difficulté qu’il le tire là en le priant, le menaçant, bref, il le fait venir et là, alors que l’autre jure par Jupiter, il le corrige, lui explique les subtilités de Socrate et sa vie sordide, pour finir le recommande à Socrate et, après de mutuels encouragements, il s’en va.
Tum duo uiri accedunt una cum Nubium choro, alter Dicaeus, id est iustus, alter Adicus, id est iniustus, qui mutuis conuiciis et calumniis digne et indigne se persequuntur.
Alors deux hommes arrivent avec le chœur des Nuées : l’un est Dikaios, c’est-à-dire Juste, l’autre Adikos, c’est-à-dire Injuste, lesquels en s’insultant et s’injuriant mutuellement, se poursuivent pour la bonne et pour la mauvaise cause.
Choro litem et altercationem sedante et ferente leges disputationis, ambo iuuenem aggrediuntur, non aliter atque Herculem illum Prodicium Virtus et Voluptas.2
Le chœur apaise la dispute et la bagarre et fixe les règles du débat ; tous deux accostent le jeune homme, de la même façon qu’Hercule chez Prodicos est accosté par Vertu et Volupté.
Prior sententiam dicit Iustus et mores antiquitatis bonos ac frugales commendat, simul Phidippidem exhortatur ut relicto Adico et Nubibus se consequatur.
Le premier à plaider est Juste et il loue les bonnes mœurs et la frugalité de l’antiquité et exhorte Phidippide à rejeter Adikos et les Nuées pour le suivre.
Huic magnis clamoribus se opponit Adicus et uitae uoluptariae commodis monstratis, temperantiae uero et aliarum uirtutum incommodis, iuueni persuadet ut suae insistat uiae simulque pluribus conuiciis Dicaeum e schola profligat.
A ce dernier, c’est par de grands cris que s’oppose Adikos et, exhibant les avantages d’une vie de plaisir et les inconvénientes de la tempérance et des autres vertus, il convainc le jeune homme de suivre sa voie et, ce faisant, avec force insultes, il chasse Dikaios de l’école.
Strepsiadae oranti et instanti, denuo Socrates fidem et diligentiam optatumque studiorum euentum pollicetur.
Strepsiade supplie et fait des demandes incessantes ; Socrate réitère sa parole d’honneur et promet son zèle et le succès de ses études.
Chorus uero spectatorum aequanimitatem expetit pro qua fecundas illi pluuias pollicetur.
Quant au chœur, il réclame l’impartialité des spectateurs, contre quoi il leur promet de fécondes pluies.
Vexatus interim summa creditorum, in quos inciderat, importunitate et minis, Strepsiades redit ad Socratem, sperans filium suum aliquid in arte sophistica iam profecisse.
Entre temps, harcelé par les créanciers, sur qui il était tombé, et qui l’importunent et le menacent, Strepsiade revient chez Socrate dans l’espoir que son fils aura déjà fait quelque progrès dans l’art sophistique.
Idque ubi cognouit, uehementer laetatur et filium iam doctiorem salutat ipsumque praestigiarum suarum specimen aliquod exhibentem, summopere admiratur.
Dès qu’il en a la preuve, il s’en réjouit vivement, salue son fils déjà bien instruit et, alors que celui-ci lui montre un spécimen de ses entourloupes verbales, il est rempli d’admiration.
Adueniunt ibi duo creditores fenus ad illum postulaturi, Pasias et Amynias, uterque cum teste.
Arrivent alors deux usuriers qui viennent réclamer leurs intérêts, Pasias et Amynias, l’un et l’autre avec témoin.
Sed utrumque eludit Strepsiades, alterum quod artem grammaticam non didicisset nec masculinum a feminino posset discernere eaque de causa nihil ei deberi affirmat, alterum uero quod, cum meteororum sit ignarus, nihil ipse debeat pro mutuo exigere.
Mais Strepsiade les ridiculise, l’un au motif qu’il n’a pas appris la grammaire et ne sait pas distinguer le masculin du féminin, raison pour laquelle il affirme ne rien lui devoir, l’autre au motif que, vu qu’il ne sait rien des météores, il ne doit rien exiger de son prêt.
Sic utrunque a sua domo remouet.
C’est ainsi qu’il les chasse tous deux de chez lui.
Ipse cum filio instituit conuiuium.
Il organise un banquet avec son fils.
Interim chorus malum, quod statim euenit, Strepsiadae praedicit, quod, cum ueterator sit, etiam dignum suis fraudibus accepturus sit stipendium.
Entre temps, le chœur lui prédit un malheur, qui se produit aussitôt : en tant que vieux routier, il va bientôt recevoir le salaire qu’il mérite pour ses tromperies.
Subitus ergo tumultus oritur, in quo uerberatus a filio Phidippide pater, iniuriam queritur spectatoribus.
S’ensuit alors une querelle soudaine lors de laquelle Strepsiade se fait frapper par son fils et se plaint de cette injustice aux spectateurs.
Sed filius, sophiscticam edoctus, iuste a se uerberatum esse patrem ostendit, propterea, quod ipse in conuicio Simonidem et Aeschylum laudasset, Euripidem uero reprehendisset.
Mais le fils, féru de sophistique, prouve qu’il a battu son père à bon droit, puisque ce dernier avait fait l’éloge de Simonide et d’Eschyle mais blâmé Euripide.
Patre paterna obiciente beneficia filio et ingratitudinem istam exprobrante, Phidippides copiosis uerborum praestigiis probare conatur, contra legis edictum parentes iuste a filiis uerberari et insuper matri quoque uerbera minatur.
Le père a beau objecter ses bons soins de père à son fils et lui reprocher cette ingratitude, Phidippide, avec force entourloupes verbeuses, entreprend de prouver que, contre les termes de la loi, les parents se font battre à juste titre par les enfants et, de surcroît, il menace aussi de frapper sa mère.
Quibus rebus commotus atque irritatus Strepsiades, damnatis Nubibus et Socratis sophismatis, seruum suum adhortatur ut arrepto ligone scholam Socratis diruat, simul ipse etiam accensis facibus eandem incendit ac diripit.
Choqué par la situation et fou de rage, Strepsiade, en maudissant les Nuées et les sophismes socratiques, ordonne à son esclave de prendre son hoyau et de casser l’école de Socrate ; lui-même pendant ce temps allume des torches et met le feu à l’école, qu’il détruit.