Aldus Romanus Demetrio Chalcondylae viro clarissimo salutem plurimam dat.
Aldus Manutius

Présentation du paratexte

Bibliographie :
  • Martin Sicherl, Griechische Erstausgaben des Aldus Manutius: Druckvorlagen, Stellenwert, kultureller Hintergrund, pubPlace, publisher, date
  • M. Sicherl, « Die Editio Princeps Aldina und Ihre Vorlagen », pubPlace editor, [in] Rheinisches Museum für Phiologie, 118, date, p. 205-225
Traduction : Alexia DEDIEU

Aldus Romanus Demetrio Chalcondylae uiro Clarissimo salutem plurimam dat.

Alde le Romain salue le très illustre Démétrius Chalcondyles

SI STARENT Athenae illae olim uirtutum omnium Domicilium Demetri doctissime deflerem una cum illis bonorum librorum et factam abhinc mille annos et fieri assidue iacturam plurimam et miserabilem.

SI ELLE TENAIT ENCORE DEBOUT, la grande Athènes, jadis siège de toutes les vertus, très savant Demetrius, je déplorerais qu’avec elle, il y a mille ans de cela, soit survenue une perte conséquente et déplorable de livres de qualité, et que cette perte ait encore lieu continuellement.

Nam ut taceam tot librorum millia in illa Ptolemaei Philadelphi bibliotheca, omnium, quae unquam fuerunt longe maxima quo tempore C. Caesar, ut totum sibi terrarum orbem subigeret, et humana et diuina iura peruertebat, infelicissime conflagrasse, ut taceam citra annos sexaginta et libros in tota Graecia, nonne in Italia tempestate nostra maximas bonorum librorum bibliothecas uel direptas paucis annis uidimus ? καὶ αὐτὴν τὴν ἑλλάδα deperditam, uel nescio quo infortunio conclusas, ac tineis, et blattis destinatas uidemus ?

Car, si tant est que je passe sous silence que plusieurs milliers de livres dans cette bibliothèque de Ptolémée Philadelphe, de loin la plus grande de toutes, sont malheureusement partis en fumée, à l’époque où Caius César, pour assujettir le monde entier, anéantissait les droits des hommes et des dieux - si tant est que je passe sous silence qu’en moins de soixante ans, à la fois les livres de toute la Grèce, et la Grèce elle-même, ont disparu, est-ce qu’en Italie, à notre époque, nous n’avons pas vu de très grandes bibliothèques pleines de bons livres pillées en quelques années ? Ne les voyons-nous pas fermées par je ne sais quelle malchance, et livrées aux mites et aux blattes ?

Sed quoniam Athenae iamdiu nullae sunt, tecum, qui solus tua doctrina nobis illas repraesentas, hanc uisum est deflere calamitatem.

Mais puisque désormais Athènes n’est plus, c’est avec toi, qui seul, pour nous, l’incarnes par ton savoir, qu’il nous a semblé bon de déplorer ce malheur.

Quanquam consultum est optime a deo studiosis omnibus excudendi librorum inuento, et laboribus nostris.

Quoi qu’il en soit, Dieu a pourvu aux vœux de ceux qui s’attachent à publier, grâce à la découverte de livres, et à nos travaux.

Quandoquidem mille et amplius boni alicuius auctoris uolumina singulo quoque mense emittimus ex Academia nostra. Et nunc decem et octo Euripidis tragoedias, tibi, qui es graecorum omnium aetatis nostrae facile princeps, nuncupatas damus, non multo post in septem primas daturi et commentarios.

Puisque nous faisons sortir chaque mois de notre Académie mille ouvrages, et plus, de bons auteurs, à présent nous te faisons dédicataire de ces dix-huit tragédies d’Euripide1, toi qui es, aisément, le premier de tous les Grecs de notre époque, et nous te ferons parvenir sous peu les commentaires aux sept premières.

VALE.

ADIEU.


1. L'édition annonce dix-sept tragédies mais en comporte dix-huit. L'Electre d'Euripide n'est imprimée qu'en 1545 par Piero Vettori à Florence.