Viro clarissimo Antonio Fayo, Paulus Stephanus.
Paulus Stephanus

Présentation du paratexte

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Traduction : Sarah GAUCHER

Viro clarissimo Antonio Fayo, Paulus Stephanus.

Au très illustre Antoine de la Faye1, Paulus Stephanus.

Ingrati animi uitio laborarem, uir clarissime, si quod opus tuis hortatibus exit, idem tibi non offerrem.

Je souffrirais, homme très illustre, du vice d’ingratitude, si je ne t’offrais pas l’œuvre qui est née de tes encouragements.

Euripides est, μισογύνης ille, poeta tot sententiis refertus, Euripides ille tragicorum poetarum princeps et quem possunt iuuenesque senesque castis auribus legere, immo et ab hoc ipso castitatis et piae uitae exempla petere.

Voilà Euripide, célèbre misogyne, poète rempli de si nombreuses sentences, cet Euripide premier des poètes tragiques, que peuvent lire avec des oreilles chastes les jeunes gens et les vieillards et où ils peuvent chercher des exemples de pureté et de vie pieuse.

Quare dolet hoc in Euripide, scholia Graeca in priores tantum septem tragoedias reperiri (quamquam tamen et horum in alias tragoedias spem facit, in sua ad Paulum III Pontificem dedicatoria, qui haec collegit, non contemnendae doctrinae uir, Arsenius).

C’est pourquoi, on s’afflige chez Euripide de ne trouver des scholies grecques que pour les sept premières tragédies (bien que toutefois Arsenius, homme d’un savoir non méprisable et qui les a rassemblées, nous donne l’espoir de scholies pour les autres tragédies dans sa dédicace au pape Paul III).

Vnde non ingratum forsitan erit hanc iacturam aliqua parte resarcire doctorumque uirorum Commentarios quotquot extant ad illustrationem huius operis et faciliorem cuiuis intellectum simul uno libro comprehendere, cum iis quae in Lycophrone promisimus.

D'où il ne sera peut-être pas déplaisant de réparer en partie ce dommage et en même temps de réunir en un seul livre tous les commentaires des hommes savants qui nous restent avec ceux que nous avons promis sur Lycophron pour éclairer cette œuvre et pour la faire mieux comprendre à qui veut.

Scholia uero ista multis partibus a nobis emendatiora facta et multis locis emaculata, necnon multa, male transposita, in suum et meliorem ordinem digesta, lectio ipsa fatebitur nonnulla tamen minus tolerabilia superesse, quae meliorum codicum inopia immutare fas non erat.

Mais la lecture elle-même dira que nous avons remanié ces scholies en beaucoup d’endroits et les avons corrigées en de nombreux lieux, et aussi que nous en avons classé beaucoup qui avaient été malencontreusement déplacées dans leur ordre et selon une meilleure disposition, mais que cependant quelques-unes, que le manque de meilleurs manuscrits interdisait de modifier, demeurent moins acceptables.

Tu uero, uir clarissime, si ista sub censuram tuam mittere digneris, poteris etiam in iis qui sequentur commentariis nos iuuare.

Mais toi, homme très illustre, si tu as jugé digne de les faire paraître sous ta censure, tu pourras également nous aider sur les commentaires qui suivront.

Quod ut facias, inter tuas lucubrationes et grauiores occupationes, etiam atque etiam oro.

Et je te prie encore et encore de le faire au milieu tes travaux de nuits et des occupations plus sérieuses.

Interea uero hunc nostrum Euripidem, cui successorem dabimus Sophoclem, Deo iuuante, laetus habe, et in exiguo munere mentem respice : daremus enim maiora, si et se offerrent.

Pendant ce temps, notre Euripide, auquel nous donnerons pour successeur Sophocle, avec l’aide de Dieu, reçois-le avec bonheur et considère l’intention dans ce petit cadeau : en effet, nous t'en donnerions de plus grands, s’ils se présentaient également.

Tam bene apud memores ueteris stat gratia facti.2

« La gratitude pour un bienfait passé reste ferme dans leurs cœurs qui s’en souviennent ».

Tu enim ex iis es qui me sibi deuinxerunt et, ut poeta noster, quique sui memores alios fecere merendo. 3

Car toi tu es de ceux qui m’ont lié à eux et, comme dit notre poète, de ceux « qui, par leur mérite, ont gagné la mémoire des hommes ».

Vale uir clarissime, et nos ama.

Adieu, homme très illustre, et entoure-nous de ton affection.

Idibus Martiis MDCII.

Aux ides de mars 1602.

Tuus ex animo Paulus Stephanus.

Ton ami Paulus Stephanus.


1. Antoine de La Faye, né à Châteaudun en 1540, mort à Genève en 1615, théologien protestant, médecin, pasteur, ami de Théodore de Bèze et par ailleurs parrain de Gabrielle, deuxième fille d’Aemilius Portus, née le 6 mai 1580 (voir Emile Legrand, Bibliographie hellénique, vol. 3, 1895, p. 95, en ligne.
2. Virg., En. 4.539.
3. Virg., En. 6.664.