In Œdipum Coloneum Argumentum Iachimi Camerarii.
Ioachimus Camerarius

Présentation du paratexte

Argument de l’Œdipe à Colone par Joachim Camerarius . Après un court résumé de la pièce (§1-3), l’auteur reprend la chronologie d’écriture des pièces sophocléennes, rappelant que l’Œdipe à Colone, dernière pièce de Sophocle, retranscrit les préoccupations du tragique à la fin de sa vie (§9-14). Le texte se clôture par la citation et la traduction de l’argument en vers élégiaques.

Bibliographie : Traduction : Diandra CRISTACHE

In Œdipum Coloneum Argumentum Ioachimi Camerarii.

Oedipe à Colone : argument de Joachim Camerarius.

Haec fabula quasi dependet a superiore.

Cette pièce dépend, pour ainsi dire, de la précédente.

Nam in exilium actus Œdipus iam admodum senex Athenas uenit ducente filia Antigona : curabant autem neglectum a filiis parentem filiae.

Car Œdipe, conduit en l’exil et déjà vieillard, se rend à Athènes avec pour guide sa fille Antigone : en effet, c’étaient à ses filles de prendre soin de leur père, puisqu’il était négligé par ses fils.

Ceterum fatalis eum exitus Athenas quasi appulerat, ubi apud σεμνὰς θεὰς, ut uocabantur, mortem oppeteret.

Du reste, une issue fatale l’avait pour ainsi dire poussé à Athènes pour y demander la mort auprès des « déesses vénérables », ainsi qu’on les nomme.

Ita est actio harum rerum tamquam in Attica, chorus atheniensium ciuium, cum quibus colloquitur Œdipus.

Ainsi le déroulement de ces faits a lieu comme en Attique, le chœur est composé de citoyens Athéniens, avec lesquels s’entretient Œdipe.

Interea Ismene nuntiat dissidere filios, et affore mox Creontem, qui monitus oraculo ipsum abducat.

Entre temps Ismène annonce que ses fils sont en désaccord et que bientôt arrivera Créon, qui, averti de l’oracle, emmènera Œdipe.

Is aduenit, sed discedit re infecta.

Créon se présente, mais s’éloigne sans avoir accompli son dessein.

Aduenit et Polynices, qui et ipse nihil obtinere potest precibus suis.

Se présente aussi Polynice, qui, lui non plus, ne peut rien obtenir malgré ses prières.

Tum exposito oraculo duci Atheniensium Theseo, excedit e uita.

Puis, après avoir exposé l’oracle à Thésée, chef des Athéniens, il meurt.

Haec fabula magnopere in laude et admiratione est, quam senex edidit Sophocles, gratificans et patriae et curiae, seu populo suo : nam fuisse traditur κολωνόθεν.

Cette pièce, que Sophocle a écrite dans sa vieillesse, se rendant agréable à la fois à sa patrie et à l’assemblée, mais aussi à son peuple, mérite tout à fait notre louange et admiration : en effet, on rapporte qu’il était originaire de Colone.

Quod autem a sene fuerit edita, Cicero ex Graecis ita interpretatus est de senectute.

Or, parce qu’elle a été produite par un vieillard, Cicéron a fait cette traduction à des auteurs grecs dans le De senectute.

Sophocles ad summam senectutem tragoedias fecit ; qui propter studium cum rem familiarem negligere uideretur, a filiis in iudicium uocatus est, ut quemadmodum nostro more male rem gerentibus patribus, bonis interdici solet, sic illum quasi desipientem a re familiari remouerent iudices ; tum senex dicitur eam fabulam, quam in manibus habebat, et proxime scripserat, Œdipum Coloneum recitasse iudicibus, quaesisseque num illud carmen desipientis uideretur ; quo recitato sententiis iudicum est liberatus. 1

"Sophocle écrivit des tragédies dans sa vieillesse la plus avancée ; alors que, à cause de son goût, il semblait ignorer les affaires de sa famille, il fut cité en justice par ses fils, afin que, de même qu’à notre époque on interdit habituellement de jouir de leurs biens les pères qui accomplissent mal leur devoir, de même les juges le privent de son patrimoine familial sous prétexte qu’il avait perdu l’esprit. Alors, dit-on, le vieillard lut aux juges Œdipe à Colone, cette pièce qu’il avait en main, et qu’il avait écrite peu de temps auparavant, et leur demanda si ce poème leur semblait l’œuvre d’un dément ; sitôt la lecture faite, la sentence des juges le laissa libre."

Hoc sublegit, ut alia pleraque exempla2, Valerius ex Cicerone.

Valère Maxime rapporte cela d’après Cicéron, ainsi que de nombreux autres exemples.

Sed ea actio cuius Cicero fecit mentionem Graecis est παρανοίας.

Mais cette action judiciaire dont Cicéron fait mention est pour les Grecs une action pour folie.

Lucianus in Macrobiis nomen fuisse filii accusatoris Iophon et absoluto patre illum iudices condemnasse ῥήτορευόμενος3 addit.

Le rhéteur Lucien, dans les Macrobii, ajoute que le nom du fils qui l’accusa était Iophon et que les juges le condamnèrent après avoir acquitté son père.

Huius fabulae maxime admirantur dispositionem Graeci, et stupendam uideri uolunt.

Les Grecs admirent au plus haut degré la structure de cette pièce et veulent qu’elle soit considérée comme admirable.

Argumentum etiam extat elegiaco uersu, quod adscripsimus.

Il existe également un argument en vers élégiaques que nous reproduisons ci-dessous.

Ἥλυθεν ἐκ Θήβης ἀλαὸν πόδα βακτρεύουσα Πατρὸς ἑλου4 μητρὸς τλήμονος Ἀντιγόνη. Ἐς χθόνα κεκροπίην5 καὶ τὰς Δήμητρος ἀρούρας. Σεμνῶν θʹ6 ἱδρύνθη σηκὸν ἐς ἀθανάτων. Ὠς δὲ Κρέων Θήβηθεν ἔχθων εἰσῆλθεν ἀπειλάς. Θησεὺς ταῖς ὁσίαις ῥύσατο χερσὶ βία. Φοιβείων παρέχειν χρησμῶν φάτιν εἴπεν ἀληθῶν7 Ὄνθεν8 ἄρ’ ὁ πρέσβυς τόν δὲ9 κρατεῖν 10. Ἀργόθεν ἦλθε θέων ἱκέτης κρατερὸς πολυνείκης, Τῶ δὲ πατὴρ στυγερὰς ἐξαπέλασσεν ἀράς. Μοῖραι γὰρ δυσόλυκτοι παρʹ11 ἱππείοιο Κολωνοῦ ἤγαγον ἀνδράποδον12 πνεῦμα πολυχρονίου. Ὡς δʹ ἦν αἰγείδης ἔφορος λογίων ἑκάτοιο σεισμοῖς καὶ βρονταῖς ἦν ἀφανὴς ὁ γέρων. 13

Ἥλυθεν ἐκ Θήβης ἀλαὸν πόδα βακτρεύουσα Πατρὸς ἑλου μητρὸς τλήμονος Ἀντιγόνη. Ἐς χθόνα κεκροπίην καὶ τὰς Δήμητρος ἀρούρας. Σεμνῶν θʹ ἱδρύνθη σηκὸν ἐς ἀθανάτων. Ὠς δὲ Κρέων Θήβηθεν ἔχθων εἰσῆλθεν ἀπειλάς. Θησεὺς ταῖς ὁσίαις ῥύσατο χερσὶ βία. Φοιβείων παρέχειν χρησμῶν φάτιν εἴπεν ἀληθῶν Ὄνθεν ἄρ’ ὁ πρέσβυς τόν δὲ κρατεῖν πολέμῳ. Ἀργόθεν ἦλθε θέων ἱκέτης κρατερὸς πολυνείκης, Τῶ δὲ πατὴρ στυγερὰς ἐξαπέλασσεν ἀράς. Μοῖραι γὰρ δυσόλυκτοι παρʹ ἱππείοιο Κολωνοῦ ἤγαγον ἀνδράποδον πνεῦμα πολυχρονίου. Ὡς δʹ ἦν αἰγείδης ἔφορος λογίων ἑκάτοιο σεισμοῖς καὶ βρονταῖς ἦν ἀφανὴς ὁ γέρων.

Horum uersuum talis est sententia :

Voici la traduction de ces vers :

Coniugii infoelix materni crimine, natae Ipse suae innitens Œdipus Antigonae, Thebis Cecropios disertis uenit in agros, Fessusque incubuit sedibus Eumenidum. Saeuus adest Creo qui repetat. Sed dextera Thesei Iniusta satis est ui prohibere senem. Tunc memorat fati leges, populum fore bello Egregium, cuius stent sua busta solo. Venit et Argiua Polynices urbe profectus, Hunc genitor a se dira precatus agit. Namque sibi addictae de colle trahebat equestri Ad se longa animae tempora parca senis. Dumque animo Aegides perpendit dicta, mouetur Terra, senexque inter fulmina raptus erat. 14

« Œdipe, rendu misérable par le crime de l’inceste, s’appuyant sur sa fille Antigone, vint, après son départ de Thèbes, dans les champs de Cécrops, et, las, il s’assit sur le siège des Euménides. Le terrible Créon arrive pour le réclamer. Mais la main de Thésée suffit à soustraire le vieillard à une violence injuste. Alors il rappelle des lois du destin, , que ce peuple sera remarquable à la guerre, lui dont les tombeaux se tiennent sur ce sol. Arrive aussi Polynice, venu de la ville argienne ; son père, après lui avoir lancé de terribles malédictions, l’éloigne. Et de fait, sur la colline équestre de Colone, le Destin, de son âme favorable, tirait à lui le long cours de la vie du vieillard. Et pendant que le fils d’Égée médite sur ces paroles, la terre s’ouvre et le vieillard est enlevé au milieu des éclairs. »

Historia autem Œdipi fere in argumento Tyranni est exposita.

Toutefois, l’histoire d’Œdipe Roi est presque exposée dans l’argument.


1. Cic., CM 22.
2. Val. Max., Dictorum factorumque memorabilium libri 8.7.12..
3. Luc., Macr. 24.
4. “ὁμοῦ” (De Marco, Op. Cit.)
5. “Κεκροπίης” (ibid.)
6. “δʹ” (ibid.)
7. “ἀληθῆ” (ibid.)
8. “ἔνθεν” (ibid.)
9. “τόνδε” (ibid.)
10. “πόλεμος” (ibid.)
11. “δυσάλυκτοι ἐϕ'” (ibid.)
12. “ἀνδραπόδων” (ibid.)
13. De Marco, Vittorio, Scholia in Sophoclis Œdipum Coloneum.
14. De Marco, Vittorio, Scholia in Sophoclis Œdipum Coloneum.