Présentation du paratexte
Le texte présente des considérations sur le titre choisi pour la pièce : Chrestien souligne l’écriture par Sophocle de deux Philoctète, le premier à Lemnos, le second à Troie, les deux pièces devant former un triptyque avec les Trachiniennes. Le terme se termine sur l’examen des arguments de Philoctète et par l’annonce d’une hypothèse originale.
Bibliographie :Ad Sophoclis Philoctetam in Lemno Glossemata.
Glossaires au Philoctète à Lemnos de Sophocle.
Titulum huic fabulae feci non simpliciter Philoctetam, sed Philoctetam in Lemno, quia certum est notumque uel ex Grammaticorum Glossis docuisse Sophoclem etiam Philoctetam ad Troiam.
J’ai choisi pour titre de cette pièce non pas simplement Philoctète, mais Philoctète à Lemnos, parce qu’il est certain et connu fût-ce par les gloses des grammairiens que Sophocle a produit également un Philoctète à Troie.
Et extant apud Hesychium uersus indidem, quos hic frustra quaeras, neque dubito
quin uersus ille, μέλη βοῶν ἄναυλα καὶ ῥακτήρια
1
Il en subsiste chez Hesychius des vers, qu’on questionne en vain ici, et je ne doute pas que ce vers, « En poussant des cris durs et discordants... » soit de Sophocle.
Nam Hesychius citat ἐν Φιλοκτήτῃ τῷ ἐν Τροίᾳ
2
En effet, Hesychius dit « dans Philoctète à Troie ».
Quod ego uellem in mentem uenisse uiro docto et diligenti qui in festinatis Noctibus suis Parisinis ad Atticas A. Gellii lib. XIII cap. XVII falsum titulum fabulae Sophocleae quae φυλότιδες pro φιλοκτήτης habet, non audet emendare, quia uersus illic laudatus non extat in hoc nostro Sophoclis Philocteta.
Et j’aurais souhaité que ce témoignage soit venu à l’esprit d’un homme savant et diligent3, qui, dans ses hâtives Noctes Parisinae. Atticis A. Gellii Noctibus inuigilatae, n’a pas osé corriger au livre XIII chapitre XVII le titre fautif de la pièce de Sophocle qui présente Phulotides pour Philoctète, parce que le vers ici considéré ne subsiste pas dans notre Philoctète de Sophocle.
Eum ego uersum existimo Sophoclis esse ex ea tragoedia, quae inscripta fuit Φιλοκτήτης ἐν Τροίᾳ, quae hanc in Lemno sequebatur, et cum Trachiniis τριλογίαν faciebat, quo modo ueterum fabulas fuisse digestas et testis est Laertius4, et amplius diximus ad Aeschyli Prometheum Desmotam.
Pour ma part, je pense que ce vers est de Sophocle, issu de la tragédie qui a été intitulée Philoctète à Troie : elle suivait notre Philoctète à Lemnos et faisait trilogie avec les Trachiniennes, selon la manière dont Diogène Laërce rapporte que les pièces des Anciens ont été divisées et dont nous avons parlé plus amplement concernant le Prométhée enchaîné d’Eschyle.
Sic in hoc poeta Triplicem habes eiusdem subiecti fabulam, puta Oedipos Tyrannum et Coloneum, et Antigonam.
Ainsi, chez ce poète, tu trouves une pièce triple sur un même sujet : pense à Œdipe Roi, Œdipe à Colone et Antigone.
Ceterum huius fabulae Hypothesis luculenta exstat apud Philostratum iuniorem in fine lib. I. Imaginum.5
Du reste, une hypothèse éclairante de cette pièce demeure chez Philostrate à la fin du livre 1 des Imagines.
Nam quae praefertur uulgatis editionibus breuior est, nihilque aliud continet nisi abductos Philoctetam et Helenum, hunc a Troia ad statiua Graecorum, illum a Lemno ad Troiam.
Car celle qui est mise en tête des éditions publiées est plus brève et ne contient rien d’autre que le récit de l’enlèvement de Philoctète et d’Hélénus, le second de Troie au campement des Grecs, le premier de Lemnos à Troie.
Piget etiam subicere interpretationem eius quam habemus ὑποθέσεως ἐμμέτρου, quia post Camerarium esset Crambe bis cocta6
Je répugne également à mettre ci-dessous la traduction que nous avons faite du résumé métrique, parce qu’après Camerarius le chou aurait été cuit deux fois.
Tentabimus nouam ex nostro Marte : quam si quis fastidioso stomacho lecturus est, transire poterit conniuentibus oculis, quos recludat si libet ad antiquae alterius ἀνάγνωσιν.
Nous en proposerons une autre de notre cru : et s’il y a quelqu’un pour la lire l’estomac lourd, il pourra passer outre en fermant les yeux pour les rouvrir, s’il le souhaite, afin de reconnaître sa sœur aînée.