Présentation du paratexte
Dans un poème en distiques élégiaques, Giovanni Domenico Florenzi loue Delrio
d’avoir fait sortir Sénèque des ténèbres où il était, et l’inscrit dans la
lignée des grands noms représentatifs de chaque genre poétique, énumérés au
début de ses vers.
Bibliographie :
-
Florence de Caigny, « Les
Syntagma tragœdiæ latinæ de Del Rio (1593-1594) :
pour une lecture jésuite des pièces de Sénèque », colloque «
Anthropologie tragique et création poétique de l’Antiquité au XVIIhi siècle français », Nice, 24-26 novembre 2016.
-
M. Dreano, « Un commentaire des
tragédies de Sénèque au XVIhi siècle par
Martin-Antoine Del Rio », dans Les tragédies de
Sénèque et le théâtre de la Renaissance, éd.
editor
et al., pubPlace,
publisher, date, p. 203-209.
-
J. MachielsenMartin Delrio, Demonology
and Scholarship in the Counter-Reformation,
pubPlace, publisher,
date2015.
- Paré-Rey, Pascale, "Les éditions des tragédies de Sénèque conservées à la
Bibliothèque nationale de France (XVe-XIXe s.)", in L’Antiquité à la BnF,
17/01/2018, https://antiquitebnf.hypotheses.org/1643
- Paré-Rey, Pascale, Histoire culturelle des éditions latines des tragédies
de Sénèque, 1478-1878, Paris, Classiques Garnier, « Histoire culturelle »
20, 2023
Traduction : Pascale PARÉ-REY
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Ioannis Dominici Florentii Romani Carmen
Poème du romain Giovanni
Domenico Florenzi1
Arma tibi, siluaeque, Maro, et bene olentia
rura
Debent, una tuis aucta uoluminibus :
Omniparens docti rerum natura Lucretii
Versibus : at satyra, Flacce, chelysque,
tibi :
Syllaba quin etiam facundo pura Catullo :
Saeuus amor numeris, culte Tibulle, tuis.
C’est envers toi, Virgile, que sont redevables les armes, les forêts et les
champs aux doux parfums,
développés ensemble dans tes volumes2 :
la nature, mère de toutes choses, envers les vers
du savant Lucrèce ; mais la satire, et la lyrique, c’est envers toi, Horace,
bien plus, les poèmes purs envers l’éloquent Catulle,
l’amour cruel, élégant Tibulle, envers tes mesures.
Te soccus, gratique, sales, Venus ipsa, Terenti,
Agnoscit, plaudunt tota theatra tibi.
Le socque et les jeux de mots plaisants, Vénus elle-même, te reconnaissent
Térence ; des théâtres entiers t’applaudissent.
Vix cuiquam primas defert epigramma uenustum,
Auctorem nosti uixque cothurne tuum :
Iudicio at magni haec, immortalisque Marulli,
Quem merito priscis adnumerare queas,
Romanos referens qui arguto carmine uates,
Cuique suum assignat debito honore locum.
À peine une agréable épigramme décerne-t-elle le premier rôle à quelqu'un que tu
connais l’auteur
et à peine, cher cothurne, connais-tu le tien :
et cela, au jugement du grand et immortel Marullus3,
que l’on pourrait à bon droit compter parmi les anciens,
lui qui, évoquant chaque poète romain par son chant précis,
assigne à chacun sa place avec l’honneur qui lui est dû.
Idem nunc aliud sentiret, si tua uiuens,
Antoni, legeret scripta diserta,
quibus
Annaeum inlustras : nobis squalore, situque
Ereptum, studio restituisque tuo.
Il ressentirait également à présent autre chose, si de son vivant,
Antonio lisait tes habiles écrits, par lesquels
tu mets Sénèque en lumière : tu l’as arraché à la poussière et à la
moisissure
et nous l’as restitué par ton travail.
Atque ideo hic tragicae princeps dehinc esto Camoenae,
Cognita quae nulli delituit domino.
Et, pour cela, qu’advienne désormais ce prince de la camène tragique
bien connue, qui ne s’est cachée derrière aucun maître.
Quod si fato aliquo latebras Medea relinquet,
Ingenio, Naso, nobilitata tuo,
Illa tui ingenii partus, quae nunc quoque caelum
Exhorret sceleris conscia forte sui :
Arbitrii haec fuerit tum fas rescindere nostri
Decreta, alterutri restituique gradum.
Or si Médée abandonne ses cachettes par quelque hasard,
rendue fameuse par ton génie, Ovide,
fruit de ton génie, qui, peut-être consciente de son crime,
abhorre aussi le ciel à présent :
il sera alors permis à notre libre-arbitre de déchirer ces décrets
et de rendre à l’un ou l’autre son grade.
Tu interea praestans animi, noua gloria saecli
Nostri, hac mortaleis perge iuuare uia.
Toi entretemps, esprit supérieur,gloire nouvellede notre siècle,
continue d’aider les mortels dans cette voie.
Nam tibi non dederunt superi, sine pectore, corpus,
Diuitias parca non tribuere manu.
Car les dieux d’en haut ne t’ont pas donné de corps sans cœur,
t’ont attribué des richesses d’une main prodigue.
Ergo age, praeclaras artes monimentaque, patrum
E tenebris effer qua potes unus ope.
Donc, allez, porte ces arts illustres et les monuments de tes pères
hors des ténèbres, par un pouvoir dont seul tu es capable.
Non unquam te his auxilio uenisse pigebit,
Non facilem medicas adplicuisse manus.
Tu ne regretteras jamais de leur avoir porté secours,Ni de leur avoir
appliqué, dans ta bonhomie, tes mains de médecin.
Officiis nam obstricta tuis tua nomina tradet
Posteritas saeclis innumer abilibus.
La postérité transmet en effet tes noms attachés à tes offices
pour des siècles innombrables.
2. Référence à
l’
Énéide, aux
Bucoliques, aux
Géorgiques.
3. Michael Tarchianota,
mieux connu sous le nom de (Michael) Marullus ou encore de Michel
Marulle, est né à Constantinople en 1453 et mort en 1500 près de
Volterra. Il fit partie du cercle de Laurent le Magnifique et fut connu
pour ses élégies latines ; il publia des
Epigrammata en
1493 et des
Hymni de 1489 à 1492, réunis en 1497 sous le
titre d'
Epigrammata. Ses poèmes ont été récemment
édités : (Marullo Tarcaniota, 2012).