Présentation du paratexte
Cette épître dédicatoire à trois jeunes frères est un traité de métrique térentienne bien fait, très pédagogique, avec illustrations, schémas, définitions rigoureuses, exemples, exceptions. Le titre courant porte la mention PRAEFATIO.
Bibliographie :- Bovier, Kevin, « Rétablir la métrique de Térence au xvie siècle : le cas du Iudicium de Glaréan (1540) », Anabases Traditions et réceptions de l’Antiquité, 29-2019, 93-106.
- Huguet, Émeline, « Macé Bonhomme, un imprimeur lyonnais du XVIe siècle », mémoire de master (Lyon 2, dir. R. Mouren), disponible sur https://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/64689-mace-bonhomme-un-imprimeur-lyonnais-du-xvie-siecle.pdf
- Van Rooy, Raf, « The diversity of Ancient Greek through the eyes of a forgotten grammarian. Petrus Antesignanus (ca. 1524/1525-1561) on the notion of ‘dialect’ », Histoire Épistémologie Langage, Année 2016, 38-1, pp. 123-140 (en ligne sur https://www.persee.fr/doc/hel_0750-8069_2016_num_38_1_3547).
P. Antesignanus Rapistagnensis Antonio, Theophilo, et Ioanni Saraeis fratribus salutem dicit
Pierre Davantès de Rabastens1. salue les frères Antoine, Théophile, et Jean Saraeus.
Plerique et prisci et recentiores haud uulgaris litteraturae uiri multam ac bonam operam in Terentianos uersus contulerunt, ut eorum numeros, quibus sine dubio astringuntur, ad certam exactamque comicorum poematum rationem exquirerent.
Beaucoup, chez les anciens comme chez les modernes, hommes de grande culture, ont travaillé copieusement et bien sur les vers de Térence, en recherchant leur scansion, à laquelle ils sont certainement assujettis, pour établir la métrique exacte et précise des poèmes comiques.
Verum pueri nouicii, ad quos maxime huius laboris fructus pertinebat, uix ullum ex accuratis et meditatis istorum commentationibus emolumentum percipere potuerunt.
Mais les écoliers débutants, à qui le fruit de ce travail s’adressait principalement, ne purent à peu près retirer aucun profit des notes précises et bien pensées de ces gens-là.
Videntur enim uiri illi graues incubuisse in eam curam et cogitationem, quae sibi summam dignitatem et gloriam esset allatura.
En effet, ces hommes sérieux semblent s’être occupés d’un soin et d’une réflexion capables de leur attirer le mérite le plus haut et la gloire.
Itaque ardua tantum et obscuriora interpretando explanasse contenti, minutiora caetera, quorum doctrina et tractatio praecedere, uel certe coniugi debuerat, leuiter adtigerunt, ut adolescentuli qui his studiis initiantur, se ad cognitionem huius rei, quam ex communi quadam hominum opinione reconditissimam arbitrantur, desperent posse peruenire.
C’est pourquoi, se contentant d’expliquer dans leurs commentaires seulement les points difficiles et particulièrement obscurs, ils ont effleuré les plus simples, dont l’enseignement et le traitement devraient être un préalable ou au moins un complément, en sorte que les jeunes gens qui débutent dans ces études désespèrent de pouvoir parvenir à apprendre une matière qu’ils trouvent, selon l’opinion générale, très énigmatique.
Vt igitur eos ab huiusmodi desperatione ad spem reuocarem, ad minima ista me demittere non recusaui.
Donc pour les faire revenir de ce désespoir vers l’espoir, je n’ai pas refusé de m’abaisser à ces bagatelles.
Neque enim hic difficilia tantum enodauimus, sed ne unam quidem totius Terentii syllabam reliquimus intactam, quam ad unguem non excusserimus, idque absque ulla uerborum pompa aut magnificentia, sed nudis litterarum notis, et methodo quam potuimus breuissima et facillima.
En effet, nous n’avons pas seulement ici éclairci les cas difficiles, mais nous n’avons pas non plus laissé une seule syllabe de tout Térence sans la traiter, sans la mettre d’équerre, et cela sans l’apparat ou la magnificence des mots, mais au moyen de simples signes graphiques, et de la méthode la plus courte et facile2.
Doctrinae opinionem adfectent alii ; ego pro mea uirili parte me puerorum et formandis et promouendis studiis omnem meam operam addixisse aperte et ingenue fateor.
Que les autres briguent la réputation de savants ; moi, pour ma part, j’avoue avoir dédié tout mon travail ouvertement et sincèrement à la formation et au développement des études des jeunes gens.
Vestris uero, Saraei pueruli, auspiciis potissimum, hunc nostrum eorum gratia in Terentii comoedias suspectum laborem in publicum prodire uolui, quod ob mirificam ingenii et probitatis indolem (qua plene iam et patris uariam eruditionem, spectatosque et probatos eius mores repraesentatis, et aequales uestros omnes facile superatis) ob animumque uestrum in me propensiorem, digni maxime atque idonei uidebamini, qui nostra et a maleuolorum morsu fortiter et industrie tutari possetis, et eadem bonis quamplurimis probare haud aspernaremini.
Mais c’est surtout en pensant à vous, jeunes frères Saraeus, que j’ai voulu faire publier ce mien travail sur les comédies de Térence, entrepris pour votre initiation, parce que, avec vos dons remarquables d’intelligence et de probité (par lesquels vous êtes déjà pleinement les images de la vaste culture de votre père et de ses mœurs exquises et louées et surpassez facilement toute votre génération), avec votre affection pour moi, vous me sembliez dignes et capables de pouvoir protéger courageusement et énergiquement mes affaires de la morsure des jaloux sans rechigner à les encourager de nombreux bienfaits.
Sed iam ueniamus ad explanationem notarum, quibus tota fere nostra haec commentatio continetur.
Mais venons-en à l’explication des signes diacritiques, qui concernent l’intégralité de notre édition commentée.
̆ syllabam breuem, ̄ longam demonstrat : pedes uero quibus Terentiani uersus dimetiuntur : disyllabi : iambus ̆ ̄ , trochaeus ̄ ̆ , pyrrhichius ̆ ̆ , spondeus ̄ ̄ ; trisyllabi : brachysyllabus ̆ ̆ ̆ , dactylus ̄ ̆ ̆ , anapaestus ̆ ̆ ̄ , creticus ̆ ̄ ̆ , amphibrachus ̆ ̄ ̆ , bacchius ̆ ̄ ̄ ; tetrasyllabus : proceleusmaticus ̆ ̆ ̆ ̆ ; litteris sequentibus designantur : i t p s b d a κ α β π3.
Le signe ̆ désigne une syllabe brève, ̄ une longue : pieds qui se scandent dans les vers de Térence : disyllabiques : iambe ̆ ̄ , trochée ̄ ̆ , pyrrhique ̆ ̆ , spondée ̄ ̄ ; trisyllabiques : tribraque ̆ ̆ ̆ , dactyle ̄ ̆ ̆ , anapeste ̆ ̆ ̄ , crétique ̆ ̄ ̆ , amphibraque ̆ ̄ ̆ , bacchée ̆ ̄ ̄ ; tétrasyllabique : procéleusmatique ̆ ̆ ̆ ̆ ; on les désigne par les initiales suivantes : i t p s b d a κ α β π4.
Versus autem hic iambici aut trochaici sunt omnes, atque utrique aut monometri, aut dimetri, aut trimetri, aut tetrametri, et rursus aut acatalectici, aut catalectici, aut brachycatalectici, aut hypercatalectici.
Or, les vers sont ici tous iambiques ou trochaïques, et chacun des deux ont soit une mesure, soit deux, soit trois, soit quatre, et inversement sont soit acatalectes, soit catalectiques, soit brachycatalectes, soit hypercatalectes5.
Iambici ab iambo pede, et trochaici a trochaeo nomen habent.
Les vers iambiques tirent leur nom de l’iambe, et les vers trochaïques du trochée.
Iambici igitur sunt in quorum sedem aliquam iambus, aut in ultimam pro iambo pyrrhichius ingreditur, trochaici, in quibus datur trochaeo locus.
Les vers iambiques sont donc ceux où, à n’importe quelle place, entre un iambe ou, au dernier pied, un pyrrhique au lieu d’un iambe ; les trochaïques, ceux où l’on donne sa place au trochée.
Iambici siue trochaici monometri sunt qui una mensura, hoc est pedibus duobus constant ; dimetri qui mensuris duabus, et pedibus quatuor ; trimetri qui mensuris tribus, ac pedibus sex, unde et senarii dicti sunt ; tetrametri siue quadrati qui mensuris quatuor, octo uero pedibus, unde et octonarii a Latinis nominantur.
Les monomètres iambiques ou trochaïques sont ceux qui ont une seule mesure, donc deux pieds ; les dimètres qui ont deux mesures, et quatre pieds ; les trimètres qui ont trois mesures, et six pieds, d’où leur nom de sénaire ; les tétramètres ou carrés sont ceux qui ont quatre mesures, et donc huit pieds, d’où leur nom d’octonaires en latin.
Monometri, dimetri, trimetri et tetrametri in quibus nihil abundat, neque desideratur quicquam, acatalectici nuncupantur ; catalectici qui syllaba una breuiores, et brachycatalectici qui duabus : hypercatalectici uero in quibus aliquid redundat.
Les monomètres, dimètres, trimètres et tétramètres dans lesquels il n’y a ni surplus ni manque sont appelés acatalectes ; les catalectiques sont ceux qui sont plus courts d’une syllabe, et les brachycatalectes de deux ; mais les hypercatalectes sont ceux dans lesquels il y a surplus.
E iambicis in usu sunt maximo apud Terentium trimetri siue senarii acatalectici, et tetrametri siue octonarii tum acatalectici tum catalectici ; in rariori dimetri acatalectici et trimetri catalectici.
Parmi les vers iambiques, les plus en usage chez Térence sont les trimètres (ou sénaires) acatalectes et les tétramètres (ou octonaires), tantôt acatalectes, tantôt catalectiques ; plus rarement les dimètres acatalectes et trimètres catalectiques.
E trochaicis usitatiores sunt tetrametri catalectici, minus usitati dimetri catalectici et trimetri item catalectici.
Parmi les vers trochaïques, les plus utilisés sont les tétramètres catalectiques, les moins utilisés les dimètres catalectiques et les trimètres catalectiques.
Reliquorum generum exempla non nisi rarissima apud hunc auctorem inueniuntur.
Les autres types ne se rencontrent qu’exceptionnellement chez cet auteur.
Iambici trochaeum non ferunt, neque pyrrhichium nisi loco ultimo, at trochaici neque iambum, neque pyrrhichium.
Les vers iambiques ne présentent ni trochée, ni pyrrhique excepté au dernier pied, et les trochaïques ne présentent ni iambe, ni pyrrhique.
Quatuor pedes brachysyllabum, spondeum, dactylum et anapaestum tam iambici quam trochaici quauis sede recipiunt, praeterquam ultima si acatalectici, et paenultima si catalectici fuerint, quibus in locis iambici iambum, et trochaici trochaeum proprie requirunt.
Les quatre pieds tribraque, spondée, dactyle et anapeste sont accueillis tant dans les iambiques que dans les trochaïques à n’importe quelle place, sauf la dernière s’ils sont acatalectes et l’avant-dernière s’ils sont catalectiques, places où les iambiques requièrent l’iambe et les trochaïques le trochée, respectivement.
Tamen in catalecticorum regione penultima brachysyllabus et nonnumquam dactylus pro trochaeo collocantur ; atque pro iambo quiuis pes, cui in caeteris iambicorum sedibus daretur locus.
Cependant, dans la zone de l’avant-dernier pied des vers catalectiques, on trouve le tribraque et parfois le dactyle au lieu du trochée ; et au lieu de l’iambe, n’importe quel pied autorisé dans les autres places des iambiques.
In ultima uero catalecticorum sede pro iambo in iambicis, et pro trochaeo in trochaicis ponitur semipes, hoc est, prima pedis illius syllaba ; nempe breuis pro iambo, et pro trochaeo longa ; sed cum cuiusuis uersus ultima sit anceps, pro priore iambi, longa ; et contra, breuis pro prima trochaei collocatur.
Mais à la dernière place des catalectiques au lieu d’un iambe dans les ïambiques et d’un trochée dans les trochaïques, on met un demi-pied, c’est-à-dire première syllabe du pied attendu ; donc en guise d’iambe une brève, et en guise de trochée une longue ; mais comme tous les vers ont la dernière syllabe indifférenciée, en guise de première syllabe de l’iambe, on trouve une longue ; et au contraire une brève en guise de première syllabe du trochée.
Pyrrhichius etiam in iambicis acalecticis pro iambo ultimum locum occupat, at alibi nusquam uisitur.
Le pyrrhique aussi, dans les iambiques acatalectes, occupe la dernière place, en guise d’iambe, mais on ne le voit que là.
Proceleusmaticus raro sese offert ; eI tamen nullo refragante datur locus et in iambicis et in trochaicis.
Le procéleusmatique se montre rarement ; mais puisque rien ne s’y oppose, il a sa place tant dans les iambiques que dans les trochaïques.
Creticos, amphibrachos, et bacchios quidam omnino respuunt, illos alii aegre quidem admittunt, sed eos prorsus reiciendos nequaquam censent.
Les crétiques, les amphibraques et les bacchées, certains les refusent en bloc, d’autres les tolèrent du bout des lèvres sans estimer devoir les rejeter catégoriquement.
Nos ubique fere quo pacto et horum et illorum opinio defendi posset indicauimus, uni uersui duos dimensionis modos adsignantes ad eum usque locum qui dissensionis esset terminus, saepe etiam ad rem ipsam plenius explanandam breuissimis scholiis adhibitis.
Quant à nous, partout nous avons montré comment soutenir l’opinion des uns et des autres en précisant pour chaque vers deux modes de scansion jusqu’au bout du passage controversé, et même souvent en ajoutant, pour plus de clarté, de brèves explications.
Ac primus quidem modus, qui tres hos pedes recipit, planus, simplex, expeditus et euidens est.
Et le premier mode, qui admet ces trois pieds6, est égal, simple, facile et clair.
Non enim nouit insolitas et asperas illas diaereses, synaereses et crebras litterarum elisiones, quae posteriore dimensionis ratione iis sunt perscrutande ; qui nulla non diuerticula, quosuis anfractus, et omnia suffugia quaerunt, quo monstra illa (ut ipsi loquuntur) exterorum pedum possint euitare.
En effet, il ignore ces insolites et pénibles diérèses, synérèses et abondantes élisions de lettres, qu’il faut scruter dans le second type de scansion adopté par ceux qui cherchent tous les détours, tous les biais et toutes les échappatoires pour pouvoir éviter les monstres (comme ils disent eux-mêmes) que sont ces pieds étrangers.
Praecipua effugia consistunt in diaeresibus, synaeresibus, et elisionibus.
Les principales échappatoires consistent dans les diérèses, synérèses et élisions.
Diaeresi unam syllabam in duas diuidunt ; nos hanc duobus in apice punctis appositis designauimus, ut, cuï, deïn, dïi,dïis, ïam, cum e monosyllabis fiunt disyllaba, cuïquam, deïnde, proïnde, cum e disyllabis trisyllaba iudicantur.
Avec la diérèse, ils divisent une syllabe en deux ; nous, nous l’avons marquée avec un tréma au-dessus, comme cuï, deïn, diï,diïs, ïam, lorsqu’un monosyllabe est compté en deux syllabes, cuïquam, deïnde, proïnde, lorsque des dissyllabes sont comptés à trois syllabes.
Synaeresi duas syllabas in unam contrahunt, quam hac nota ᷃7 priori uocali superposita indicatam uoluimus.
Avec la synérèse, ils contractent deux syllabes en une, que nous avons voulu indiquer par ce signe ᷃ placé sur la première voyelle.
Illa igitur et sequens uocalis, quae in aliis poetis atque in hoc iuxta primum dimensionis modum duas efficerent syllabas, in unam coeunt cum alteram scansionis rationem, quae exteros illos pedes non recipit, intuebimur, uti uocabulis sequentibus, abe᷃o, abe᷃at, rede᷃am, rede᷃at, ade᷃o, a᷃hu, a᷃is, a᷃it, a᷃in, a᷃iebas, ali᷃enus, ali᷃is, ali᷃o, audi᷃o, audi᷃at ; circuiti᷃one, co᷃emisse, comme᷃are, confite᷃or, consili᷃i (idem iudicium de reliquis genitiuis singularibus, et nominatiuis pluralibus in ii : ut, negoti᷃i, gaudi᷃i, preti᷃i, cetari᷃i, lani᷃i. Quidam malunt legere consili, negoti, gaudi, preti), cu᷃ius, cupi᷃o ; de᷃ambularum, de᷃ae, de᷃orum, deu᷃m, de᷃um, de᷃os, De᷃mea, denu᷃o, dispendi᷃o, di᷃u, di᷃utius, Dori᷃o, du᷃arum, du᷃as, du᷃os ; e᷃a, et in caeteris casibus, e᷃ius, e᷃iusmodi, e᷃um, e᷃undem, e᷃am, e᷃a, e᷃odem, e᷃am, e᷃orum, e᷃is, e᷃o aduerbium, e᷃ho, eripu᷃it, eti᷃am ; fi᷃ant, fi᷃et, fortunati᷃or, fu᷃it, fu᷃erunt, fu᷃ere, fu᷃isse ; gradi᷃uscula, grati᷃a, gaude᷃ant ; Hegi᷃oni, hu᷃ius, hu᷃iusmodi ; iligne᷃is, illi᷃us, indu᷃it, iniuri᷃a, intrŏire (quasi duae essent dictiones, intro ire ; introibas, quasi intro ibas ; sic in ante᷃hac, poste᷃a, quŏad, quasi ante hac, post ea, quo ad. Me ipsum et te ipsum pro duabus dictionibus sumit semper Terentius, ideo e semper eliditur in me et te), isti᷃us ; liberi᷃us ; mane᷃o, me᷃us, me᷃a, me᷃um per omnes casus (sic tu᷃us, tu᷃a, tu᷃um, et su᷃us, su᷃a, su᷃um), mi᷃hi (alii malunt legere mî. Sic nil, non nil pro nĭhil, nonnĭhil), misecordi᷃a ; necessari᷃o, nunti᷃are, nupti᷃ae, nupti᷃is ; omni᷃a (sunt qui in hoc nomine primam ancipitem esse uelint nam ab ὁμῶς, deductum uolunt :) patru᷃um, perdi᷃unt, perdu᷃int, Phani᷃um, Phormi᷃o, Phormi᷃onem, pri᷃or, pri᷃oreis, pri᷃us, psaltri᷃a, pu᷃er ; re᷃i ; sci᷃o, sci᷃as, sci᷃ens, nesci᷃ebam, sci᷃ebat, serui᷃ebas (quidam legunt scibam, nescibam, seruibas), soli᷃us, somni᷃um, succense᷃am, sumptu᷃osa ; time᷃o ; ui᷃a, uidu᷃a, uspi᷃am.
Par conséquent, cette voyelle et la suivante, qui, chez d’autres poètes que ceux qu’on scande selon ce premier mode, produiraient deux syllabes, fusionnent en une seule, quand nous adopterons l’autre mode de scansion, qui refuse les pieds étrangers : ainsi dans les voyelles suivantes : abe᷃o, abe᷃at, rede᷃am, rede᷃at, ade᷃o, a᷃hu, a᷃is, a᷃it, a᷃in, a᷃iebas, ali᷃enus, ali᷃is, ali᷃o, audi᷃o, audi᷃at ; circuiti᷃one, co᷃emisse, comme᷃are, confite᷃or, consili᷃i (même diagnostic en ce qui concerne le reste des génitifs singuliers et des nominatifs pluriels en ii, comme negoti᷃i, gaudi᷃i, preti᷃i, cetari᷃i, lani᷃i. Certains préfèrent lire consili, negoti, gaudi, preti), cu᷃ius, cupi᷃o ; de᷃ambularum, de᷃ae, de᷃orum, deu᷃m, de᷃um, de᷃os, De᷃mea, denu᷃o, dispendi᷃o, di᷃u, di᷃utius, Dori᷃o, du᷃arum, du᷃as, du᷃os ; e᷃a, et à tous les cas, e᷃ius, e᷃iusmodi, e᷃um, e᷃undem, e᷃am, e᷃a, e᷃odem, e᷃am, e᷃orum, e᷃is, e᷃o adverbial, e᷃ho, eripu᷃it, eti᷃am ; fi᷃ant, fi᷃et, fortunati᷃or, fu᷃it, fu᷃erunt, fu᷃ere, fu᷃isse ; gradi᷃uscula, grati᷃a, gaude᷃ant ; Hegi᷃oni, hu᷃ius, hu᷃iusmodi ; iligne᷃is, illi᷃us, indu᷃it, iniuri᷃a, intrŏire (comme s’ils étaient prononcés en deux mots, intro ire ; introibas, comme intro ibas8. ; ainsi dans ante᷃hac, poste᷃a, quŏad, comme ante hac, post ea, quo ad. Me ipsum et te ipsum dont toujours deux mots chez Térence et pour cette raison e est toujours élidé dans me et te), isti᷃us ; liberi᷃us ; mane᷃o, me᷃us, me᷃a, me᷃um à tous les cas (de même tu᷃us, tu᷃a, tu᷃um, et su᷃us, su᷃a, su᷃um), mi᷃hi (d’autres préfèrent lire mî. De même nil, non nil à la place de ni᷃hil, nonni᷃hil), misecordi᷃a ; necessari᷃o, nunti᷃are, nupti᷃ae, nupti᷃is ; omni᷃a (certains préfèrent considérer la première syllabe comme indifférenciée car ils considèrent ὁμῶς comme son étymon9) patru᷃um, perdi᷃unt, perdu᷃int, Phani᷃um, Phormi᷃o, Phormi᷃onem, pri᷃or, pri᷃oreis, pri᷃us, psaltri᷃a, pu᷃er ; re᷃i ; sci᷃o, sci᷃as, sci᷃ens, nesci᷃ebam, sci᷃ebat, serui᷃ebas (certains lisent scibam, nescibam, seruibas), soli᷃us, somni᷃um, succense᷃am, sumptu᷃osa ; time᷃o ; ui᷃a, uidu᷃a, uspi᷃am10.
Haec fere sunt quae contrahere coguntur ii, qui creticos, bacchios, et amphibrachos in Terentianos uersus non admittunt.
Voilà les contractions forcées pour ceux qui n’admettent pas les crétiques, les bacchées et les amphibraques dans les vers de Térence.
Crebris etiam utuntur elisionibus, quibus litteram unam tollunt e dictionis initio, uel medio, uel fine, aut etiam e calce duas.
Ils font aussi de nombreuses élisions, par lesquelles ils enlèvent une lettre au début du mot, ou au milieu, ou à la fin, ou encore deux à l’extrémité.
Id apostrophi nota ’ quae litterae reiciendae admoueatur, placuit indicare ; tamen cum litterae n applicatur non abiciendam sed abiectam innuit, ut, adeon’, ain’, uiden’, pro adeone, aisne, uidesne ; ubi et hoc obiter monendum, uocalem praecedentem, breuem hac interrogationis nota fieri, etiam si natura produceretur, quidam ancipitem esse arbitrantur.
J’ai décidé de l’indiquer par le signe de l’apostrophe ’, à placer au-dessus de la lettre élidée ; mais quand elle concerne le n, le signe indique une élision non pas à faire mais déjà faite, comme dans adeon’, ain’, uiden’ pour adeone, aisne, uidesne ; et là, au passage, il faut avertir que la voyelle précédente s’abrège avec cette marque interrogative, même si elle est longue par nature ; certains la jugent indifférenciée.
E principio tollitur u, ut in dictionibus sequentibus u’erebamini, u’ero, u’erum, u’erus, u’ix, u’oluntate, u’oluptas, u’os, quas ut exteris illis pedibus locum nullum praebeant, ita efferunt, erebamini, ero, erus etc.
Au début, on élide le u consonne, comme dans les termes suivants : u’erebamini, u’ero, u’erum, u’erus, u’ix, u’oluntate, u’oluptas, u’os, que ceux qui ne aissent pas de place aux pieds étrangers prononcent erebamini, ero, erus etc.
In uoluptas tamen potest u ante pt, ut ante mutam cum liquida Graecorum more correptum censeri.
Dans uoluptas cependant le u avant pt peut être considéré comme une occlusive devant liquide et abrégé à la grecque.
E medio eliduntur a, u uocale et consonum, l, s et t : a, ut pa’rare, quasi prare ; u uocale, discipu’li, saecu’lum, pericu’lum per omnes casus (sunt qui malint legere discipli, saeclum, periclum, pericli, periclo, etc.), postu’lo, post’lare, quasi dicas postlo, postlare ; u consonum, ut adiuu’erit, diu’itias, enimu’ero, inu’eniet, inu’idia, subu’enite, quasi legas adiuerit, diitas (uel ut alii malunt ditias), enimero, ineniet, inidia, subenite.
Au milieu, on élide a, u voyelle ou consonne, l, s et t sont élidés : a, comme dans pa’rare, valant prare ; u voyelle, comme dans discipu’li, saecu’lum, pericu’lum à tous les cas (certains préfèrent lire discipli, saeclum, periclum, pericli, periclo, etc.), postu’lo, post’lare, comme si on disait postlo, postlare ; u consonne, comme adiuu’erit, diu’itias, enimu’ero, inu’eniet, inu’idia, subu’enite, comme si on lisait adiuerit, diitas (ou, selon d’autres, ditias), enimero, ineniet, inidia, subenite.
L deperditur saepe in pronomine il’le, ill’a, illud per omnes casus, ill’ic, ill’uc ; tum i corripitur, ile, ila, ilud, etc. ; ut et nonnulli etiam legunt in paul’u’lum eliduntur l et u, ut legatur paulum, quod et alii alterius loco reponunt.
Le l se perd souvent dans le pronom il’le, ill’a, illud à tous les cas, ill’ic, ill’uc ; alors i s’abrège, ile, ila, ilud, etc. ; de même aussi quelques-uns lisent encore paul’u’lum où le l et le u sont élidés, pour lire paulum, leçon que certains préfèrent à l’autre.
S abicitur in huius’modi et eius’modi, ut antepaenultima corripiatur.
Le s s’élide dans huius’modi et eius’modi, ce qui abrège l’antépénultième.
In ist’e, ista, istud, et reliquis casibus, ist’uc, istic, ist’aec ist’orsum, quidam s, alii t malunt elidere, ut i breue censeatur.
Dans ist’e, ista, istud, et tout le reste des cas, ist’uc, istic, ist’aec ist’orsum, certains préfèrent élider le s, d’autres le t, ce qui abrège le i.
In fine dictionum saepe absumuntur d et s ante quasuis litteras, sed ante consonantes ipsae solae, ante uocales uero, non solum ipsae, sed uocalis illas praecedens atque haec fere sunt in quibus absorbetur d : ad’ (et in composito ad’sum), apud’, id’, quid’ (maxime ante pronomen iste, ista, istud), quod’, sed.
À la fin des mots souvent, le d et le s disparaissent devant n’importe quelle lettre, elles-mêmes seules devant consonne, mais devant voyelle, non seulement elles-mêmes, mais aussi la voyelle précédente et voici les mots où d s’amuït : ad’ (et dans le composé ad’sum), apud’, id’, quid’ (surtout devant le pronom iste, ista, istud), quod’, sed.
S in terminationibus as, es, os, excludendum non offendi, nisi in dies’, narras’, res’ et taces’ ; in is parce, idque dum breue est, ueluti in nominatiuo, anguis’, mensis’, pestis’, is’, cum est pronomen : in genitiuo, ut adolescentis’, uenustatis’que, in uerbis, ut agis’, credis’, dicis’, obtundis’.
Je n’ai pas trouvé d’exemple d’élision de s dans les finales as, es, os, sauf dans dies’, narras’, res’ et taces’ ; en is raremant, et dans ce cas avec une brève, comme au nominatif anguis’, mensis’, pestis’, is’ pronom ; au génitif, comme dans adolescentis’, uenustatis’que, dans les verbes, comme agis’, credis’, dicis’, obtundis’.
In magis’ et satis’ passim absorbetur s ; sunt tamen qui in illis locis malint legere mage, et sat.
Dans magis’ et satis’ le s s’amuït ici ou là ; certains préfèrent toutefois éditer dans ces passages mage et sat.
In dictionibus in us breue desinentibus elisionem admittunt etiam ii qui creticis, bacchiis, et amphibrachis utuntur, ut in opus’, herus’, stolidus’, ipsus’, dehortatus’, eius’, huius’, quibus’, sumus’ aliisque innumeris ; qui pedes illos reiciunt, productum etiam interimunt, ut in rus’, audent etiam elidere b in ob’, l in simul’, m ante consonantes in quidem’ et enim’, atque t in erit’, excessit’, facit’, liceret’, occidit’, oportet’, studet’ et similibus, sic in quot’ et ut’.
Dans les mots se terminant en un us bref, l’élision est admise même par ceux qui acceptent les crétiques, bacchées et amphibraques, comme dans opus’, herus’, stolidus’, ipsus’, dehortatus’, eius’, huius’, quibus’, sumus’ et d’autres d’innombrables ; ceux qui rejettent ces pieds, éliminent encore une longue, comme dans rus’, ils osent aussi élider le b dans ob’, le l dans simul’, le m devant consonne dans quidem’ et enim’, et t dans erit’, excessit’, facit’, liceret’, occidit’, oportet’, studet’ et équivalents, comme dans quot’ et ut’.
Sed de diaeresi, synaeresi, et elisione hactenus.
Mais en voilà assez sur la diérèse, la synérèse et l’élision.
Illud et hoc loco monendum, apud hunc auctorem passim inueniri uocales finales non elisas (quod hac nota " expressimus) ante alias uocales idque in uno atque eodem uersu et contra, in uersibus diuertis uocalem finalem prioris a uocali sequentis absorberi et rursus primam secundi uersus ad finem prioris pertinere.
Il faut aussi avertir ici que, chez cet auteur, çà et là, on trouve des voyelles finales non élidées (que nous exprimons avec ce signe ") devant d’autres voyelles et cela dans un seul et même vers ; et, à l’inverse, dans des vers différents, la voyelle finale du premier mot s’élide devant voyelle initiale du suivant et en revanche la première voyelle du second vers participe de la fin du vers précédent.
Idem iudicium de dictionibus in m desinentibus, cum sequitur uocabulum a uocali incipiens.
Même diagnostic pour les mots se terminant en m, quand il suit un mot commençant par une voyelle.
Ceterum uocales illae finales non elisae, quae natura aut diphthongo producerentur, hic fere corripiuntur ; interdum tamen inuariatae manent, et maxime ante h, quod hic saepe ita plenam uim habet consonantis, ut praecedens breuis in m uel aliam consonam desinens positu longa censeatur.
Du reste, ces voyelles finales non élidées, qui seraient longues par nature ou par diphtongue, sont souvent brèves ici ; cependant quelquefois elles restent inchangées, et surtout devant h, qui ici a ainsi souvent sa pleine valeur de consonne, au point qu’une finale brève finie par m ou autre consonne soit comptée longue par position.
Horum omnium exempla huc congerere superuacaneum esse duximus, cum nusquam lectori non sint obuia futura, in quamcumque huius libri paginam oculos conuerterit.
Il nous a semblé superflu de réunir ici les exemples de tous ces cas, puisque partout le lecteur en aura sous les yeux, à quelque page de ce livre qu’il les pose.
Illum itaque his principiis et praeceptionibus instructum eo dimittam, modo et illud addiderim, nos uni uersui geminam dimensionem apposuisse, non solum ubi incidit disceptatio ob alienos illos pedes, sed etiam in uersibus ambiguis, cum scilicet idem uersus simul et in iambici acatalectici, et in trochaici catalectici numeros uenire poterat.
Aussi le laisserai-je outillé de ces quelques bases et préceptes, pourvu que j’ajoute aussi que nous avons proposé une double scansion à chaque vers, non seulement là où il y a controverse à cause de la présence des pieds étrangers, mais aussi dans les vers ambigus, quand un même vers pourrait se scander en même temps comme un iambique acatalecte ou comme un trochaïque catalectique.
Sunt et alia ratione uersus ambigui,
praecipue tetrametri catalectici in quorum sede septima ponitur brachysyllabus, in
aliis uero regionibus nullus consistit iambus, neque etiam trochaeus ; ut actus 2
Andriae, paenultimo scenae 2 uersu, Nisi uides, nisi senis amico oras, ambis c. bene mones
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Il y a aussi des vers ambigus pour une autre raison, surtout les tétramètres catalectiques au septième pied desquels se trouve un tribraque et où, nulle part ailleurs, on n’a d’iambe ni de trochée12 ; ainsi Andrienne, Acte 2, scène 2, dernier vers : Nisi uides, nisi senis amico oras, ambis CHR.-bene mones.
Hic uersus regione prima tertia et septima brachysyllabum habet, secunda dactylum, quarta, quinta, et sexta, spondeum,ultima syllabam longam, quae uersum illum catalecticum esse demonstrat.
Ce vers, aux pieds 1, 3 et 7, a un tribraque, un dactyle au pied 2, un spondée aux pieds 4, 5 6, une syllabe longue dans la dernière, ce qui démontre que ce vers est catalectique13.
Sed ambigere quispiam merito possit, iambicusne, an trochaicus censeri debeat ; cum ibi nullus sit iambus qui iambicum, neque trochaeus, qui trochaicum possit indicare.
Mais on pourrait hésiter avec raison, pour savoir s’il faut le compter comme iambique ou comme trochaïque, puisqu’on n’y voit ni iambe pour indiquer un vers iambique, ni trochée pour indiquer un trochaïque.
Iudicium igitur aliunde petendum est, nempe a uicinis uersibus, qui trochaici sunt omnes, quo circa et hic trochaicus est iudicandus.
Dans ces circonstances, on doit chercher la décision ailleurs, évidemment dans les vers voisins, qui sont tous trochaïques ; il en résulte que celui-ci aussi est trochaïque14.
Quamuis enim iambici et trochaici saepe inueniantur intermisti ; hoc tamen est ita temperandum, ut quo plures eiusdem generis in unum digerere queamus, id omnino conemur.
Car s’il est vrai que vers iambiques et trochaïques se trouvent souvent mélangés, il faut toutefois combiner les choses de manière à tenter au mieux de rassembler dans un même passage le plus de vers du même type.
Neque uero huius rei gratia, uel etiam ob alias quascumque comicorum uersuum leges, eorum diligentiam imitandam existimo, qui etiam contra omnium probatorum et receptorum codicum testimonia nihil non in Terentio sibi licere inuertere autumant, modo uersum ad unguem suis numeris constare demonstrent, in quorum tamen obseruatione ipse Terentius de industria negligens fuisse perspicitur.
Mais il ne faut pas, pour cette raison ni non plus pour je ne sais quelles autres règles de versification comique, imiter, à mon avis, le zèle de ceux qui, fût-ce contre les témoignages des bons exemplaires consensuels, affirment s’autoriser à tout changer dans Térence, pour peu qu’ils démontrent qu’un vers bien fourbi correspond à son type métrique, alors qu’on voit bien, à l’examen, que Térence lui-même a été volontairement négligent.
Nos Terentio numeros, non Terentium numeris astringendum arbitramur.
Nous, nous sommes d’avis d’assujettir la scansion à Térence et non Térence à la scansion.
Quapropter nihil unquam ob metri rationem immutauimus in contextu, nisi duo, aut plura eaque fide digna in idem consentirent exemplaria ; lectionis tamen uarietatem ubique fere ad marginem apposuimus, una cum litteris et notis, quae diuersam indicent dimensionem ab ea quam receptiori et in contextu positae lectioni assignauimus.
Aussi n’avons-nous jamais rien changé dans le texte pour des raisons métriques, à moins pour le calcul du mètre, à moins que deux ou trois exemplaires, et encore dignes de confiance, ne s’accordent sur la même leçon ; mais nous avons annoté en marge les variantes et aussi les sigles et signes pour indiquer une scansion différente de la leçon préférentielle que nous avons placée dans le corps du texte.
(Valete Saraei, eximia spe adulescentuli. Lugduni, Idibus Augustis,1556)
(Adieu, frères Saraei, jeunes gens porteurs des plus grandes espérances. Lyon, 13 août 1556.)