Laurentio Medici Florentinae Reipublicae Optimatum clarissimo, Nicolaus Angelius Bucinensis. S.
Nicolaus Angelius

Présentation du paratexte

L’humaniste florentin Niccolo Angeli s’adresse à son maître et dédicataire, Laurent de Médicis. Il présente d’abord la difficulté et l’intérêt de son travail d’édition (1-13) ; il fait l’éloge ensuite de la famille Médicis, en évoquant successivement les ancètres du destinatiares et les efforts de chacun d’eux pour la promotion des lettres latines et grecques.

Traduction : Mathieu FERRAND

Laurentio Medici Florentinae Reipublicae Optimatum clarissimo, Nicolaus Angelius Bucinensis. S.

A Laurent de Médicis, le plus illustre des patriciens de l’État florentin, Nicolaus Angelius de Buccine1 adresse son salut.

Iure quodam haereditario deuincti sumus, Magne Laurenti Med. ut quae nobis sunt bona priuataque et publica a patribus relicta, ea (si fieri potest) meliora, aut certe non deteriora, culpa nostra reddantur posteris.

Nous sommes obligés, très noble Laurent de Médicis, par une sorte de droit héréditaire, de transmettre à la postérité les biens privés et publics que nous ont laissés nos pères, sinon en meilleur état (si cela est possible), du moins sans leur infliger de dommage.

Hanc legem liberis haereditates, hanc principibus respublica, hanc suis professoribus imponunt bonae artes.

Cette loi, les héritages l’imposent aux enfants, l’Etat aux princes, les arts libéraux à ceux qui les professent.

Nam si ad temporis edacitatem hominum accesserit incuria, breui siderum lapsu, quicquid est humano sudore et ingenio partum fluere quotidie in deterius certum est.

En effet, si l’incurie de l’humanité s’ajoute à la voracité du temps, aussi vite que chute une étoile filante, il est certain que tout ce qu’ont engendré la sueur et l’esprit humains s’écroule chaque jour un peu plus.

Sed quoniam alius industria alia posset neque enim natura omnibus omnia tradidit, suo quisque muneri consulendum habet.

Mais comme chacun fait ce qu’il peut, à sa mesure, que la nature, en effet, ne nous a pas tous dotés de la même façon, alors chacun doit s’acquitter de la charge qui est la sienne.

Nos uero qui humanitatis litteras felicissimis domus tuae auspiciis publice profitemur ad recognitonem Romanae linguae scriptorum curam omnium pulcherrimam, animum operamque retulimus, ueterum exemplo.

Nous, qui professons publiquement les lettres humaines sous les auspices très favorables de ta maison, nous consacrons la plus belle part de notre attention, notre esprit et notre soin à l’étude des oeuvres latines. Et nous suivons en cela l’exemple des Anciens.

Nam M. Valerius Probus antiquitatis studiosissimus, cum animaduertisset ueterum scripta per negligentiam in pernitiem labi, collatis multis in unum exemplaribus multa emendauit, distinxit, annotauit.

De fait, M. Valerius Probus, le plus savant parmi les hommes de l’Antiquité, comme il avait constaté que les écrits des Anciens tombaient en ruine à cause de négligences, après avoir réuni de nombreux textes en un seul volume, les corrigea, les démêla et les annota.

Cicero Lucretii libros de natura rerum ad C. Memmium perquam emendatos posteritati tradendos curauit.

Cicéron veilla à transmettre à la postérité les livres que Lucrèce composa sur la nature à l’attention de C. Memmius, après les avoir précisément revus.

Recognoscendas primum suscepimus uinginti Plauti quae supersunt reliquae comoedias, eloquii candorisque latini delitias.

Nous, nous avons entrepris d’étudier d’abord les comédies de Plaute, délices de la langue et de la beauté latines. Elles nous sont parvenues au nombre de vingt.

Id negotii quanto mihi fuerit labori, sunt testes conatus aliquot doctissimorum aetatis nostrae hominum qui in iis emendandis, difficultate operis uicti, multa ad tenuem ex litterarum uicinitate coniecturam, plura pro captu et ex commodo suo ad implendos pedum numeros inserere coacti sunt.

Quelle peine m’a donné ce travail ? Peuvent en témoigner les efforts de quelques uns des plus savants de notre génération qui, en corrigeant ces pièces, vaincus par la difficulté de la tâche, ont été contraints de faire de nombreuses insertions, pour la moindre conjecture déduite de la proximité des lettres, et plus encore, selon leur capacité et à leur convenance, pour compléter de rythme du vers.

Istiusmodi autem uersuum tibicines et ociosas uoces, quae mihi ad iambi numerum subdititiae uiderentur, aegre quidem admisi ; malo enim aliquot in toto carmine claudicent metra, quam, ingenuo candori, qui fluit ex ore huius poetae felicissimus, alia adulterini uerbi macula assuatur.

Or, j’ai accepté avec peine les chevilles métriques et les mots inutiles de ce genre parce qu’ils me semblaient inventés pour obtenir le rythme iambique ; je préfère en effet que quelques vers, sur la totalité de la pièce, boitent un peu, plutôt que d’ajouter, à la noble beauté qui émane, bienheureuse, de la bouche de ce poète, la souillure d’un mot apocryphe.

Quod si quaedam adhuc desiderari in hoc poemate et nonnulla ibidem adulterina pro ingenuis recepta dicas, nulli certe industriae nostrae tenuitate praereptus est restituendi siqua desunt, aut meliora reponendi, si fuerint inuenta, locus.

Mais si tu prétends que certaines choses manquent encore dans ce poème ou que d’autres mots, apocryphes, ont remplacé les mots d’origine, sache que ce n’est pas par défaut de travail de notre part que l’on a laissé passer cette occasion de restituer ce qui manque, le cas échéant, ou de faire de meilleures conjectures, s’il est vrai qu’on n’en a jamais fait.

Qua in re nunc illud de his comoediis pleno ore affirmauerim multo omnium esse emendatissimas quae ad hanc diem impressae cicumferuntur, quod cuique planum fuerit, qui hanc nostram emendationem cum ceteris quandocumque contulerit.

Sur ce point, maintenant, je peux bien affirmer haut et fort que ces comedies sont bien plus correctes que celles qui jusqu’à présent circulent sous forme imprimée ; et cela apparaîtra clairement à tous ceux qui, un jour, compareront nos corrections à celles des autres.

Hoc de plurimis uere licet gloriari quod nos omnium primi quos legerimus prologum Bacchidibus dimidiatis et primi actus initium diligentia nostra repertum restituimus, Mostellariae uero scaenas utique perturbatas et earum membra disiecta et confusa in ordinem suum redegimus.

Et, par dessus tout, nous pouvons être fiers d’avoir, les premiers parmi ceux que nous avons lus, rendu aux Bacchides mutilées leur prologue et le début du premier acte que notre diligence a permis de retrouver, ainsi que d’avoir restauré les scènes de la Mostellaria où régnait la confusion, en mettant en ordre leurs membres épars et emmêlés.

Has igitur annotationum operas (quales quales sunt) splendori tuo inscripsimus, Magne Laurenti.

Ainsi, nos travaux de philologue (quels qu’ils soient), nous les plaçons sous le patronage de ta splendeur, très noble Laurent.

Non de more modo ueterum qui lucubrationes suas regibus nuncuparunt ut Iulius Pollux ad Commodum Caesarem de grammatica, Vitruuius ad Augustum de architectura, Oppianus ad Antonium de piscibus, Diophanes ad Deiotarum regem de agricultura scripserint

Et en cela, nous n’imitons pas seulement les Anciens qui ont associé à leurs travaux le nom de souverains, comme Julius Pollux dédia son traité sur la grammaire à Commode, Vitruve son traité sur l’Architecture à Auguste, Oppien son traité sur les poissons à Antoine, Diophane son traité sur l’agriculture à Déjotarus2

(semper enim est habitum honestum et gloriosum hoc muneris genus, quo hominum memoria ad posteros transfertur, quamquam sunt grauiore praeconio, quam hoc millesimo librorum titulo clarissimae tuae ac tuorum laudes aeternitati sacrandae),

(ce genre de cadeaux par lequel la mémoire des hommes est transmise à la postérité a toujours été tenu pour honorable et glorieux, quoique la gloire très éclatante de ta personne et de ta famille méritât d’être immortalisée par un héraut plus prestigieux que ce énième titre de notre catalogue).

Sed quod auito patrocinii iure debentur litteratorum uigiliae nomini tuo.

Mais ces travaux doivent te revenir, en vertu du droit ancestral de patronage, comme “protecteur des gens de lettres”.

Quis enim nostra ac patrum memoria, doctrinae aut alia ingenii laude usquam enituit qui non sit maiorum tuorum opibus adiutus, gratia subleuatus, auctoritate illustrates ?

Qui, en effet, a jamais brillé dans notre mémoire et celle de nos pères par la gloire de sa culture ou par celle de son esprit sans avoir été soutenu par la générosité de tes ancêtres, élevé par leur faveur, mis en pleine lumière par leur autorité ?

Eo numero plures recensere non grauaremur nisi epistolae legem prolixitate praeteream.

Nous n’hésiterions pas à citer bien des noms si nous n’outrepassions pas, par notre prolixité, les lois du genre épistolaire.

Exempla tamen domestica de multis perpauca paterni amoris ac singularis parrentum tuorum ad ingeniorum eruditionem beneficentiae proferam.

Je donnerai cependant, parmi de nombreux autres possibles, quelques exemples tirés de ta maison, susceptibles d’illustrer l’affection de tes pères et la singulière bienveillance de tes ancêtres pour l'érudition.

Cosmus, ne res altius repetatur, tibi abauus, quem natura finxit ad honestatem, grauitatem, temperantiam magnitudinem animi, iustitiam, ad omnes denique uirtutes, magnum hominem et excelsum, quem Florentia, una patrum et populi uoce, patrem patriae publice lacedemonio marmore inscripsit, Marsilium Ficinum pueritiam adhuc agentem, a patre eius adse forte adductum intuens, ac pueri indolem probans, ut fuit ille diuino iudicio ac sapientia uir, quaerit de patre quod uitae iter puer ingrederetur.

Côme, pour ne pas remonter plus haut, ton trisaïeul, dont la nature fit un homme considérable et remarquable par sa noblesse d’âme, son autorité, sa sagesse, sa magnanimité, son sens de la justice, par toutes ses vertus enfin, lui dont Florence, avec le consentement unanime des patriciens et du peuple, fixa dans le marbre de Lacédémone 3, publiquement, le titre de “Père de la Patrie”, voyant que Marcile Ficin, encore enfant, lui était présenté par son père, et éprouvant les qualités de l’enfant – car il avait un jugement et une sagesse tout divins – demande au père dans quelle carrière l’enfant allait s’engager.

Si fortunae nostrae uolent, inquit, cupio erudiri disciplinis.

“Si notre fortune veut bien nous le permettre, dit-il, je veux qu’il fasse des études.”

Tum Cosmus, tu corporum (chirurgus enim erat) alienis impensis, hic nostris, animorum uulnera, ut spero, curabit.

Alors Côme lui répondit : “A toi, les autres confient les blessures de leurs corps (car il était chirurgien), à leurs risques et périls ; à les risques et périls, je l’espère, je lui confierai un jour, les blessures de mon âme”.

Ex eoque ei tum domi, tum foris in publicis litterarum gymnasiis abunde omnia ad summam doctrinam suppeditauit, ac ubi uidet et graecis et latinis litteris eruditissimum ac honestissimum inter academicos, locum tenere donat amoenissimo suburbano fundo, ac Platonem quem nunc nostri legunt latinum faciendum mandat.

Et il lui fournit en abondance, tant chez lui que dans les collèges publics, tout ce qu’il lui fallait pour acquérir la plus grande culture ; quand il constate qu’il est devenu, et en grec et en latin, le plus érudit et le plus honorable des savants, il lui offre un domaine dans la campagne environnante et lui confie la traduction latine de Platon, que nos compatriotes désormais peuvent lire.

Illustris ad haec hominis in diuinum cultum et communem omnium eruditionem munificentia.

Illustre générosité de cet homme, à cet égard, pour le culte divin et pour l’instruction de tous !

Quot enim et quae posuit templa suis cum biliothecis Diis immortalibus ?

Combien de temples, enfin, et quels temples a-t-il construits avec ses bibliothèques, pour les dieux immortels ?

Quarum nobilissima ea quae ad diui Marci est omnis generis librorum opulentissima.

La plus prestigieuse étant celle de saint Marc, si riche en livres de tous genres !

Petrus huic filius tibi proauus, magnus et ille uir, Gentilem humili loco et genere natum spectatae tamen indolis, domi ad summam doctrinam et suis opibus aluit et sua auctoritate pontificem Aretinum fecit.

Pierre, son fils, ton bisaïeul, un grand homme lui aussi, nourrit dans sa maison, pour le plus grand profit de la science et par ses largesses, Gentile4 né dans un milieu et une famille modeste, mais doué de dispositions remarquables ; il en fit, de sa propre autorité, l’évèque d’Arezzo 5.

Laurentius autem Cosmo auo suo homine sapientissimo sapientior auus tuus, quem tu nomine, ingenio, moribus, omni uirtutum laude nobis abunde refers, cuius prudentiam, grauitatem, iustitiam, altitudinem animi Italia omnis et eius cuncti principes admirati ultro sibi quod in hoc uno suam salutem esse positam uidebant patronum constituere,

Laurent, ton grand-père, plus savant que son propre grand-père Côme, le plus savant des hommes, que tu nous rappelles beaucoup par ton nom, ton esprit, tes moeurs et tes glorieuses vertus, dont l’Italie entière et tous ses princes, admirant sa sagesse, sa gravité, son sens de la justice et sa hauteur de vue, firent leur maître, parce qu’ils voyaient bien que sur lui seul reposait leur propre salut,

cuius amicitiam et sultanus (ne alia referam) Egypti rex per legatos pretiosis muneribus petiuit, cum audiret esse in urbe sua excellenti ingenio adolescentem nomine Angelum Politianum, ad sese accersitum, praeceptorem Petro clarissimo parenti tuo constituit.

dont aussi le sultan (pour m’en tenir à cela), roi d’Egypte, demanda l’amitié par la voix de ses ambassadeurs, en échange de précieux présents, Laurent, donc, comme il entendit dire qu’il y avait à Florence un jeune homme d’un esprit remarquable, nommé Ange Politien, le fit venir à lui et en fit le précepteur de ton oncle, le très fameux Pierre ;

Summa ope et librorum utriusque linguae copia, tum domestica, tum undique accersita, singulare hominis ingenium fouet, locupletat ; gaudet intra suos castissimos ac sanctissimos penates coalescere eius doctrinam ad immortalitatem.

il favorise et enrichit l’esprit singulier de cet homme de moyens considérables et d’une grande quantité de livres latins et grecs, qu’il tire de sa propre bibliothèque ou qu’il fait venir d’un peu partout ; il se réjouit que sa culture, dans sa propre maison, la plus pure et la plus sainte de toutes, puisse se developper jusqu’à atteindre l’immortalité.

Qua in re non fuisse falsum testes sunt nobis eruntque posteritati multa et praeclara Politiani eruditissime scripta.

Qu’il en fut bien ainsi témoignent, pour nous, et en témoigneront pour la postérité, de la manière la plus savante, les nombreux écrits de Politien au si grand renom.

Illud uero multo magnificentius et regium magis quod cum graecam linguam barbarorum armis ad ultimam internitionem sensim dilabi animaduerteret – quasi parum fuerit quod Emanuel Chrysolura, Iohannes Arguropilus, Iohannes Andronicus byzantius, Demetrius Atheniensis, summa doctrina uiri, in urbem ad publicam lectionem sua, patris et aui opera honesta mercede conducti fuerint – Ianum Lascharim hominem et genere et graeca doctrina apprime nobilem, solertia singulari, iudicio acri, ingenio ad promerendam hominum gratiam miro, larga pecunia per omnem graeciam mittit ad conquirenda coemendaque cuiusuis discipilinae graeca uolumina.

Mais ceci est beaucoup plus somptueux et plus digne encore des rois : comme il se rendait compte que la langue grecque glissait insensiblement vers sa perte sous les coups des barbares – comme s’il n’avait pas suffi qu’Emmanuel Chrysoloras, Johannes Argyropilus, Ioannes Andronicus Byzantius, Demetrius l’Athénien, tous hommes de grande culture, aient été conduits à donner cours public dans sa ville grâce à ses efforts, ceux de son père et de son grand-père, contre un honnête salaire – il envoie à travers la Grèce, avec des fonds importants, Jean Lascharis, très noble personnage par sa naissance et sa connaissance du grec, d’une intelligence singulière, d’un esprit acéré, doté d’un incroyable talent pour s’attirer les bonnes grâces de tous, afin d’acquérir et d’acheter en grand nombre des livres grecs sur tout sujet.

Ac ubi uidet Theodorum Gazam, Hermolaum Barbarum uenetum, quo tempore ille Romae indigne exulat, uiros doctrinae Gloria illustres, se frusta a magnis conditionibus in urbem inuitare exemplo Iohannis Pici Mirandulae diuino ingenio et mirabili doctrina uiri, quem tum Florentiae Laurentius suis opibus et auctoritate tegebat, doctorum hominum amore eidem mandat adducendos ad sese pueros dociles et graecos uiros eruditos.

Mais quand Laurent voit qu’il ne peut obtenir, malgré des conditions très intéressantes, que Théodore Gaza et Hermolao Barbaro de Venise, qui à cette époque vivait à Rome un indigne exil, deux hommes illustres par leur glorieuse science, vinssent dans notre ville, ainsi que l’avait fait Jean Pic de la Mirandole, homme à l’esprit divin et d’une culture admirable, qu’alors, à Florence, Laurent couvrait de richesses de d’honneurs, il donne pour mission au même Lascharis, parce qu’il désirait s’entourer d'hommes instruits, de faire venir à lui de jeunes Grecs en formation ou des érudits d’âge mûr.

Verum illo biennio dum haec per graeciam et magnam asiae partem conquiruntur, Magnus Laurentius (sic uisum superis) obit.

Mais durant ces deux années où l’on fait ces recherches à travers la Grèce et une grande partie de l’Asie, le très noble Laurent (ainsi l’ont voulu les dieux) meurt.

Aduexit tamen Florentiam uir ille egregius supra ducenta librorum graecorum pretiosa uolumina et in iis multa, quae plerique periisse multis saeculis suspirauerant.

Cependant, cet homme remarquable a fait venir à Florence plus de cent précieux exemplaires de livres grecs ; beaucoup avaient cru qu’un grand nombre d’entre eux étaient disparus.

Multus hercle fuerim si cunctos memorem quos Petrus genitor tuus et Leo Pontifex Maximus patris tui frater (clara orbis lumina) ad disciplinas in lucemque perduxerunt.

Mais je serais, par Hercule, bien long si je rappelais tous ceux que Pierre, ton père, et le Pape Léon, le frère de ton père (éclatante lumière du monde) ont conduits vers la connaissance et la lumière.

In his Bernardum Douitium 6 Bibienensem, uirum probitate singulari, fide summa ac officii constantia in utraque Medicum fortuna, humanitate ac bonitate in omnes incredibili, ingenio ad res gerendas eximio, omni denique uirtute ita praeditum, ut eum facile intra sanctissimos Medicum lares educatum agnoscas, Cardinalem ingenti omnium laetitia spectamus.

Parmi eux, nous nous réjouissons tous très grandement de voir au nombre des cardinaux Bernardus Dovitius de Bibiena 7, homme d’une singulière probité, d’une remarquable fidélité, d’une constante loyauté à l’égard des Médicis, quelle qu’ait été leur fortune, d’une incroyable humanité et bonté pour tous, d’un talent immense dans la conduite les affaires, doté enfin de toutes les vertus, si bien que l’on reconnaît facilement qu’il a été élevé dans le très saint foyer des Médicis.

De Pontifice autem mox plura terrarum orbis.

Sur le Pape, qui règne sur toutes les terres, nous en dirons plus bientôt.

Nunc uero illud memoratu dignissimum referemus, quod ad reparandam graecarum litterarum ac diciplinarum iacturam quae sunt paene in obliuionem collapsae accersiuit (quod pater destinarat) nuper e media graecia complures spectatae indolis ingenuos pueros, ac uiros doctos quotquot reperti sunt, per quos ipsi pueri summa cura et diligentia instituantur, ad eamque rem utrisque facultates et stipendia largissime suppeditauit.

Mais pour le moment nous parlerons de ce haut fait tout à fait digne de mémoire : pour la restauration des lettres et des sciences grecques qui sont presque tombées dans l’oubli, il a récemment fait venir, comme son père lui-même l’avait voulu, depuis le centre de la Grèce, de nobles enfants aux qualités remarquables et des savants d’âge mûr, autant qu’il s’en est trouvé, pour que ceux-ci enseignent à ces mêmes enfants avec le plus grand soin et la plus grande diligence; et pour cela, il les a tous largement dotés de moyens et de salaires.

Clarissima itaque est tua domus honestarum artium parens et altrix, omnesque bonae disciplinae Medicum sunt alumnae.

C’est pourquoi ta maison très illustre est mère et nourrice des arts libéraux et toutes les belles lettres sont filles des Médicis.

Magne igitur Laurenti, cui uix adolescentiam egresso, uniuersus Patrum, ac populi consensus reipublicae nostrae habenas moderandas felicissimis auspiciis ultro commisit, hanc clientelam huic ciuitati honestissimam, Italiae illustrem, tibi haereditariam amplexare et foue, longumque patriae et uiue et uale

Ainsi, très noble Laurent, à qui, à peine entré dans l’âge adulte, l’accord universel des Patriciens et du peuple a spontanément confié, sous les auspices les plus favorables, les rênes de l’Etat, puisses-tu embrasser et favoriser ces sujets qui font l’honneur de cette cité, la gloire de l’Italie et ton héritage ; et puisses-tu, pour la patrie, vivre longtemps et en bonne santé.


1. Niccolo Angeli (1448-1529), né à Bucine (Toscane), enseigna les lettres grecques et latines à Florence. Il participa activement à l’édition les textes classiques pour l’imprimeur Filippo Giunta et ses héritiers.
2. Voir aussi Francinus, 1525 où les trois auteurs sont cités, dans le même ordre, pour développer la même idée.
3. Le lacedemonium marmor désigne un porphyre vert, nommé aussi “serpentin”
4. Sans doute Gentile de’Becchi, humaniste et poète néo-latin, ami de Marcile Ficin et d’Ange Politien ; Pierre de Médicis en fit le précepteur de son fils, Laurent ; il fut de fait évèque d’Arezzo de 1473 à 1497
5. C’est en réalité son fils, Laurent, qui proposa son nom
6. L’édition donne Divitium, mais il s’agit d’une coquille que nous corrigeons
7. Bernardo Dovizi da Bibbiena, le fameux auteur de la Calendria, très proche des Médicis, avait été élevé au Cardinalat par le pape Léon X en 1513