Présentation du paratexte
L’éditeur de Maizières propose un traité métrique constitué de nombreuses citations de Terentianus Maurus, grammairien latin du IIIe s. auteur d’un ouvrage Sur les lettres, les syllabes et les mètres (De litteris, syllabis, metris), citations enrichies d’extraits des tragédies, venant expliquer par l’exemple les règles établies par le grammaticus. Cet écrit assez complet, même s’il fait la part belle au vers iambique (la première partie du traité, la plus développée, en est suivie de sept autres, consacrée aux autres types de vers : trochaïque, sapphique, anapestique, glyconique, asclépiade, alcmanien / bucolique, archiloquien), fera date et sera inséré, après quelques remaniements, dans l’édition de 1514 à laquelle de Maizières contribuera aux côtés d’Érasme et de De Vercel.
Bibliographie :-
Terentiani Mauri , De Litteris, De syllabis, De metris. I II., trad. Cignolo C., pubPlace, publisher, date -
Scriptores latini de re metrica : concordantiae -
indices, Equipo de Investigación dirigido por J. Luque Moreno.
IX, Terentianus Maurus,
José Liébana Pérez , pubPlace, publisher, date -
Jan-Wilhelm Beck , Concordantia in Terentianum Maurum, pubPlace, publisher, date -
Philippe Renouard , Imprimeurs et libraires parisiens du XVIe siècle, publ. d'après les manuscrits de Philippe Renouard par le Service des travaux historiques de la Ville de Paris ; avec le concours de la Bibliothèque nationale, pubPlace, publisher, date,p. 129, 470, 502 - Paré-Rey, Pascale, "Les éditions des tragédies de Sénèque conservées à la Bibliothèque nationale de France (XVe-XIXe s.)", in L’Antiquité à la BnF, 17/01/2018, https://antiquitebnf.hypotheses.org/1643
- Chiara Cignolo, éd., Terentiani Mauri De Litteris, De syllabis, De metris, 2 vol. Hildesheim, 2002.
- Jacqueline Dangel, 1995, Histoire de la langue latine, « Que sais-je », PUF, Paris.
- Penser la prose dans le monde gréco-romain. Études réunies et présentées par Jean-Philippe Guez, Dimitri Kasprzyk, Presses Universitaires de Rennes, 2016.
- Leofranc Holford-Strevens, Aulus Gellius: An Antonine Scholar and His Achievement, Oxford University Press, 2003
- Kassel, R. - C. Austin, Poetae Comici Graeci, Berlin, New York, 1983-2000.
- Rudd N., 1989, Horace Epistles, Book II and Epistle to the Pisones (‘Ars Poetica’), Cambridge University Press.
- Olga Spevak, Isidore de Séville, Etymologiae, Paris, Les Belles lettres, 2020.
- Grimal P., 1969, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Paris, PUF.
- Hendrik Simon Versnel, Triumphus : an inquiry into the origin, development and meaning of the Roman triumph, Leiden, Brill, 1970.
- Jeroen De Keyser, éd., Francesco Filelfo, man of letters (Leiden, Pays-Bas, Etats-Unis d’Amérique, 2019).
- Jean-Louis Charlet, « La métrique latine de Filelfo : épopée, satire, élégie, ode », dans De Keyser J., 2019, Brill’s studies in intellectual history 289, Francesco Filelfo, Man of letters, Leiden, Brill.
- Henri Fairclough Rushton, Horace, Satires, Epistles and Ars poetica, Cambridge, Harvard University Press, London, Heinemann, Loeb Classical Library, 1978.
- David Amherdt, 2004, Ausone et Paulin de Nole : correspondance, Suisse, Sapheneia,
- Max Niedermann Phonétique historique du latin, Paris, Klincksieck, 1906.
- M. Aquien, Dictionnaire de poétique, Paris, LGF, 1999.
- The Catalogue of the Book Collection of the Jesuit College in Braniewo held in the University Library in Uppsala 69:
- Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France. Université de Paris et universités des départements.
- Paré-Rey, Pascale, Histoire culturelle des éditions latines des tragédies de Sénèque, 1478-1878, Paris, Classiques Garnier, « Histoire culturelle » 20, 2023
De Pomponio
autem Secundo et Seneca Tragico
iudicium Terentianus faciens sic scriptum
reliquit :
1
Terentianus Maurus, dans son jugement à
propos de Pomponius Secundus et de Sénèque le Tragique, a laissé cet écrit
:
Duabus primis absolutis partibus tertia superest, quae quo fructuosior eo difficilior est ; non tamen omittenda ne quod minus necessarium est praecipuo neglecto aduxisse uideamur, et quia iambico carmine frequentius noster Seneca usus est.
Les deux premières parties en étant achevées 3, reste la troisième, qui est d’autant plus féconde qu’elle est difficile ; elle ne doit cependant pas être omise pour éviter que nous semblions avoir ajouté des points moins nécessaires à des points essentiels qu’on négligerait, et parce que notre Sénèque s’est assez fréquemment servi de la versification iambique.
Quodque tragoediae proprium sit ab eo exordiemur, utcumque poterimus, de aliis metrorum generibus dicturi quibus maxime noster tragicus suum poema excoluit.
Et commençons par ce qui est le propre de la tragédie, dans la mesure de notre possible, avec l’intention de parler des autres types de mètres avec lesquels notre poète a le plus orné son poème.
Nam de omni metrorum genere quae antiqui usurpauerunt non est in animo dicere, tum quia ab oratione soluta parum absunt, tum quia Seneca iste ab eiusmodi uariatione abstinuit.
Car nous n’avons pas dans l’idée de nous exprimer sur chaque type de mètres que les Anciens ont employé, parce qu’ils sont alors peu éloignés de la prose4, et parce que ce Sénèque s’est abstenu de varier de la sorte.
Narrat Polistephanus scriptor diligentissimus iambum, unde carmen dicitur iambicum, ab Iambe Hippoteontis uxore nuncupatum ; aliis ab ἰαμβίζω, quod est conuicior deducentibus.
L’écrivain très scrupuleux Polistephanus5 raconte que l’iambe, d’où un poème est dit iambique, a reçu son nom de « Iambe », femme d’Hippoteon6 ; d’autres que c’est de « iambizô », ce qui équivaut à « j’injurie » pour ceux qui font l’en font dériver.
Sunt qui ab Iamba Niobes famula oriri malunt ; alii ab Iamba puella, quae hoc carmine lacerata laqueo uitam finiuit7.
Il y en a qui préfèrent le faire naître de « Iamba », la servante de Niobé ; d’autres de la jeune fille « Iamba », qui mit fin à sa vie dans ce poème en se pendant.
Non desunt qui παρὰ τò βάλλειν iambum a teli uibratione deriuent ; uel dicitur iambus (si Francisco Philelpho libro decimo tertio secundi uoluminis credatur) quasi θρίαμβος8 quem omnium primus Liber Pater de Indis deuictis instituit, unde triumphator dictus est ;
Il n’en manque pas pour faire dériver l’iambe de la vibration d’un trait, « à partir de lancer » ; ou bien l’iambe est nommé (si l’on se fie au chapitre 10 du livre II de Francesco Filelfo9) comme s’il venait de « triomphe », que le premier entre tous Liber Pater a instauré sur les Indiens vaincus, d’où il est appelé « le triomphateur » ;
undecumque tamen deriuat res est conuiciis
et maledictis perquam aptus ; hinc criminosus ab Horatio libro primo Carminum palinodiam
ita canente uocatur :
10
de quelque endroit cependant que la
chose dérive, il est apte le plus souvent aux injures et aux critiques ; de là il
est appelé « médisant » par Horace, au premier livre de ses Carmina, quand il chante
une telle palinodie :
Et Archilochus eiusdem Horatii
testimonio eo pede utpote ad id congruissimo in Lycambem sese
armauit cum in Arte Poetica dixit :
11
Et Archiloque, au témoignage du même
Horace, s’est armé contre Lycambès12 par ce pied comme étant naturellement le plus
adapté à cela, quand il dit dans son Art Poétique :
Hic sane pes ex breui prima secundaque
longa constat quod Horatius in Arte testatur :
14
Ce pied se compose bien d’une première
brève et d’une deuxième longue, ce qu’Horace atteste dans son Ars :
Propter cuius celeritatem duo iambi unam
facere mensuram uidentur ; quod ut facilius explicetur in hoc carmine :
15
Et à cause de sa rapidité, deux iambes
semblent faire une seule mesure ; pour que ce soit plus facilement explicite, ce
qu’on a dans ce vers :
Prima mensura ex / Soror tonan / conficietur ; secunda / tis hoc enim / ; tertia / solum mihi /.16
La première mesure est obtenue à partir de / Soror tonan / ; la seconde de / tis hoc enim / ; la troisième de / solum mihi.
Inde uocat idem Horatius in Carminibus Iambum celerem
dicens : et in celeres iambos misit furentem
17
De là le même Horace appelle dans ses Carmina « l’iambe véloce », en disant : « et l’emportement m’a jeté, furieux, aux iambes véloces ».
Huius pernicitas ex illo Ausonii galli poetae clarissimi satis perspicitur cum ad
suum scribens Paulinum ait :
18
On perçoit suffisamment sa souplesse à
partir de ce passage d’Ausone, poète français très célèbre, quand il s’adresse à son
cher Paulin en écrivant :
Et paulo post eundem uocat praepetem et uolucripedem qui primus nouorum metra coniunxit pedum ; ex hoc iambicum carmen dicitur quod multiplex solet esse.
Et peu après il appelle le même « ailé et au pied léger »20, lui qui le premier a uni les mètres de nouveaux pieds ; à partir de cela un vers est dit iambique parce qu’il se présente en général sous de multiples aspects.21
Est enim quoddam monometrum duobus constans pedibus, dimetrum quattuor, trimetrum sex, tetra octo, pentha decem, exa duodecim.22
Il existe en effet un monomètre se composant de deux pieds, un dimètre se composant de quatre pieds, un trimètre de six pieds, un tétramètre de huit pieds, un pentamètre de dix pieds, un hexamètre de douze pieds.23
His tribus postremis utuntur aliquando poetae comici ubi ad uerborum certationem uentum est, rarius ultimo.
Les poètes comiques se servent parfois de ces trois derniers, quand on en est venu au débat verbal, mais se servent plus rarement du tout dernier.
Est etiam aliud catalecticum, acat.24, hyper.25, brachyc.26
Il y a aussi d’autres types de vers : catalectique, acatalectique, hypercatalectique, brachycatalectique.
Quae quoniam ex Horatii carminibus satis trita uidentur, ad iambicum rediens plura
dicere supersedeo ; quod sex constans pedibus senarius dicitur multiplexque esse
solet ; nam quoddam est purum ex solis scilicet iambis cuius Terentianus sic meminit :
27
Et puisque d’après les poèmes d’Horace
ils semblent assez usités, revenant au vers iambique, je m’abstiens d’en dire
davantage ; parce que comptant six pieds, il est appelé sénaire et il se présente en
général sous de multiples aspects ; car il y en a un de pur, c'est-à-dire constitué
seulement d’iambes, dont Terentianus donne un tel témoignage :
Est enim uersus iambicus senarius ; a principio ad finem similis sibi obstare potest quod in tertio carmine alterius ponatur cuius tertia passim reperiatur correpta.
C’est en effet un sénaire iambique ; il peut se présenter semblable à lui-même du début à la fin en ce que alterius est inclus dans le troisième vers, alors que sa troisième <syllabe> se trouve partout abrégée.29
Nam indifferens est secundum generalem
regulam genitiuorum in ius quod liquidissime trocheium illud Terentii carmen probat : Sescuplo uel una uincet alterius singulum.
30
En effet, elle est indifférente selon la règle générale des génitifs en –ius, que ce vers trochaïque de Térentianus31 atteste très clairement : « ou bien encore l’une dépassera, avec la valeur d’un temps et demi, le temps simple de l’autre »32.
Inuenitur etiam uersus hipponactius qui
et σκάζων dicitur, ultimam sedem spondeo reseruans
qualis est ille Persianus
Nec fonte labra prolui caballino
33
34
On trouve aussi le vers
hipponactéen, qui est aussi appelé « scazon », réservant la dernière
position au spondée35, comme ce vers de
Perse « Nec fonte labra prolui caballino (et je
n’ai point mouillé mes lèvres dans la fontaine chevaline36) », comme dit Térentianus :
Dicitur etiam claudus ut idem probat cum
inquit :
38
On le dit aussi « boiteux », comme le
même auteur l’atteste, quand il dit :
Huius Valerius
Martialis sic meminit :
40
Martial s’en souvient de la sorte :
Iambicus uero trimeter si tragicus et
ultimam sedem contra σκάζοντοϛ naturam iambo
reliquit quod statim uidebimus, ubi hic unum de scazonte dixerimus quod perraro aut
numquam, ut Angelus Politianus in annotationibus tradit, in
duobus extremis locis praesertim apud Latinos spondeus reperitur, sicut nec iambus
in hoc enim Persii carmine Pegaseium melos
42
En réalité, si le trimètre iambique tragique a laissé aussi la dernière position contre la nature du scazon à l’iambe, c’est ce que nous allons voir tout de suite, quand nous aurons dit ici à propos du scazon cela seulement : que c’est très rarement ou jamais, comme Ange Politien le transmet dans ses annotations 43, qu’on trouve chez les Latins aux deux extrémités <du vers> un spondée, comme on ne trouve pas non plus d’iambe dans ce poème de Perse en effet du « doux chant des Muses ».44
Angelus Politianus nectar legendum censet, et recte quidem, nisi Aldo uiro sane quam in lingua et latina et graeca polito magis credendum, quis suadeat qui melos prima protracta Graecorum auctoritate fretus legi posse contendit ?
Ange Politien pense qu’il faut lire « nectar »45, et à juste titre assurément, si ce n’est qu’il faut porter davantage de crédit qu’à Alde46, un homme vraiment érudit dans les deux langues, qui pourrait nous persuader qu’il cherche à ce que melos puisse être lu en allongeant la première syllabe, en s’appuyant sur l’autorité des Grecs ?47
In hoc praeterea trimetro tragico non tot caducas frondes Œtha
48
Dans ce trimètre tragique en outre non tot caducas frondes Oetha pourquoi le spondée obtient la dernière position49, je ne le vois pas ; mais c’est vrai que Éryx est plus conforme au poème50 ;51
Legerem quemadmodum in libro manuscripto inuentum non paucis eruditis hanc lecturam magis approbantibus ostendi.
Je lirais ma trouvaille comme j’ai montré ce que j’ai trouvé dans le manuscrit à bon nombre d’érudits, plus favorables à cette lecture.
Ceterum si mihi hariolari liceret, Athos uerius quam Erix legerem ; uix enim mihi persuadetur ut ei Erix tanti sit momenti ut pro Œtha Erix subducendum ueniat ; utrum autem rectius sit expertiorum iudicio reliquo.
Du reste, s’il m’était permis de jouer les devins, je lirais « Athos » plus probant que « Éryx » ; j’ai en effet du mal à croire que « Éryx » ait une si grande importance que « Éryx » vienne pour remplacer « Œta » ; je laisse au jugement des experts le soin de trancher celui qui est le plus correct.52
Est Tragicus iambicus (ut unde digressi
sumus, reducamur) a scazonte secretus puroque magis consentiens qui aliquando in
quinta sede et sexta iambum recipiat ; non tamen sine culpa fit ut ex iambis omnibus
tragicus constet, dicente Terentiano :
53
Il existe un vers iambique tragique
(pour revenir d’où nous avons fait digression), distinct du scazon, et plus en
accord avec un <vers> pur qui admet parfois à la cinquième et à la sixième
position un iambe ; ce n’est cependant pas sans faute qu’il arrive que le vers
tragique se compose uniquement d’iambes, Terentianus disant :
Cuius pedes sic distinguuntur spondeus ad remorandam iambi celeritatem primam sortitur sibi sedem, cuius prima si in breuem resoluatur iambo cedet ; si in duas breues, anapesto ; si secunda in breues duas, dactylo ; usurpatur etiam aliquando tribrachus.
Et ses pieds se distinguent ainsi : le spondée, pour freiner la rapidité originelle de l’iambe, choisit pour lui-même la première position, dont la première syllabe, si elle se résout en brève, le cède à l’iambe ; si la seconde se résout en deux brèves, à un dactyle ; elle est même parfois prise par un tribraque.
Secundam uero sedem iambus tribrachus aut
aliquando anapestus occupat iuxta illud Terentiani :
55
Mais la deuxième position, c’est
l’iambe, le tribraque ou parfois l’anapeste qui l’occupe, selon ce passage de
Terentianus :
In illo autem carmine quod in Troade legitur Aeacide armis cum ferox laeua manu
57
insule ionio in magno
58
tantae dari uirtuti. An is meruit parum
59
Or dans ce chant qu’on lit dans la Troade60 Aeacide armis cum ferox laeua manu61, il y aura un iambe à la deuxième position ; lui dont la première syllabe est abrégée comme chez Virgile insulae ionio in magno 62 etc. quand la dernière syllabe du premier pied est abrégée à cause de la rencontre vocalique, ce qu’on trouve dans les autres lieux la plupart du temps, comme dans la même tragédie tantae dari uirtuti. An meruit parum63 ;
item in illo Laertes sic te iuuenis excipiat tuus
64
De même dans ceci Laertes sic te iuuenis excipiat tuus65 comme le vers demeure inchangé, il ne doit pas admettre de spondée, ce que l’élision de la lettre s justifiera ; mais d’autres lisent plus sûrement « Laerta », conformément à notre note à cet endroit 66
Item in illo uersu qui in ultima cernitur
tragoedia tibi uirtus illa, quae tot elisit mala
67
De même dans ce vers que l’on voit dans la dernière tragédie tibi uirtus illa quae tot elisit mala68, il y aura un iambe en deuxième position ; en effet chez Virgile comme chez Sénèque la lettre s semble être caduque plus d’une fois.
Omittitur Ennius apud quem illud satis uulgare potuissem lectione immerita ut est annotatum tibi illa uirtus subiungere, sed ne hoc facerem exemplatiorum etiam diuerso charactere notatorum conformitas Aldique uiri sine controuersia nobilissimi auctoritas me admonuit.
Je ne parle pas d’Ennius, chez qui j’aurais pu ajouter ce trait assez commun, avec une leçon indue 69 comme on a écrit tibi illa uirtus70,mais la conformité des exemplaires, même notés en caractères différents 71 , et l'autorité d'Alde, cet homme très célèbre sans conteste, m’ont gardé de le faire.
In illo enim quod est apud Horatium
Palus aptaque remis
72
haud quisquam ad uitam facile reuocari potest
73
74
En effet dans ce Palus aptaque remis qui est chez Horace, le s rajouté rend juste le vers. En outre, pour ne pas omettre quelque chose qui pourrait engendrer un très grand doute, dans ce vers haud quisquam ad uitam facile reuocari potest, l’iambe tiendra la deuxième place, car si l’on en croit Tortellius, le v de la consonne par nature fera défaut, comme dans ce vers de Térence que Tortelius lui-même prend pour argument : Sine inuidia laudem inuenies et amicos pares
In tertia sede fiet ut in prima; quarta uero ut secunda disponetur; in quinta spondeus et anapestus tribrachus uero et iambus minus frequentes erunt.
À la troisième position, il en sera comme dans la première, et à la quatrième ce sera disposé comme dans la deuxième ; et à la cinquième, les spondée, anapeste, tribraque, mais aussi iambe seront moins fréquents.
Quattuor praeterea loca inter legendum signauimus, ubi dactylus spondeo temporibus aequiualens in quinta sede statuitur.
En outre, parmi ce qu’on doit lire, nous avons signalé quatre lieux où le dactyle, équivalent au spondée par ses comptes, est placé en cinquième position.
Primum in Hercule
furente : Non causa sed nunc pereat omnis memoria
75
noscisne memet dubitat anceps memoria
76
sed tu malorum machinatrix facinorum
77
uirile robur nulla famae memoria.
78
En premier dans Hercule furieux : Non causa sed nunc pereat omnis memoria ; en deuxième dans Œdipe : noscisne memet dubitat anceps memoria ; en troisième dans Médée : sed tu malorum machinatrix facinorum ; en quatrième dans la même tragédie : uirile robur nulla famae memoria.
In ultima sede ponitur iambus, nonumquam
anapestus ni malis uersum dicere hypercathalecticum, ut in heroico fieri uidemus ;
huius exemplum est in prima tragoedia ut saepe puppes aestus inuitas recipit
79
non causa sed memoria nunc omnis pereat.
80
En dernière position est placé un iambe, parfois un anapeste sauf si l’on préfère appeler ce vers hypercatalectique, comme nous le voyons se produire dans le vers héroïque ; il y en a un exemple dans la première tragédie : ut saepe puppes aestus inuitas recipit ; de même à un autre endroit : non causa sed memoria nunc omnis pereat.
Sic enim in libro mirandae uetustatis quem habeo litteris superlatis dictionum ordinem signantibus scriptum inueni.
C’est ainsi en effet que j’ai trouvé l’ordre des mots écrit dans un livre d’une ancienneté remarquable que j’ai en ma possession, des lettres ayant été déplacées le signifiant81
Cui ea de causa plurimum fidei tribuo
quod ceteris longe tersior est ; uerum in hoc quod dictum est stabilius
constiterem ; aliis autem ut aiunt Eacum me non facio ; aliud item adduci potest
exemplum ex eadem tragoedia et fata uici morte contempta redii
82
et Exquilini pontifex ueneficii
83
Or je lui attribue le plus grand crédit pour cette raison qu’il est de loin plus soigné que tous les autres ; vraiment je m’appuierais de façon assez stable sur ce qui y est dit ; or pour les autres, comme on dit, je ne me fais pas Eaque 84; un autre exemple peut encore être ajouté, tiré de la même tragédie : et fata uici morte contempta redii, comme chez Horace et Exquilini pontifex ueneficii la paragoge85 justifie cependant ces deux lettres finales.
Illud autem longe remotius est quod est
in Medea : adiice expetita spolia Phrixi arietis
86
Or ce vers est de loin plus éloigné, qui est dans Médée : adiice expetita spolia Phrixi arietis, où nous dirons, de la même manière que dans les exemples précédents, qu’il y a un dactyle, ou un spondée, si l’on veut être d’accord avec Servius, au témoignage duquel I s’acquitte de sa fonction de consonne dans parietibus, ariete et d’autres mots semblables.87
Et haec de iambico trimetro.
Et voilà à propos du trimètre iambique.
Vtitur trocheico carmine aliquando
tragicus quale est illud tetrametrum catalecticum : Pallidi fauces Auerni uosque Taenarei specus
88
La métrique tragique utilise parfois le vers trochaïque, tel ce tétramètre catalectique : Pallidi fauces Auerni uosque Tenarei specus, qui est de huit pieds, et remarquable par l’absence d’une syllabe. 89
Eodem Seneca tribus in locis utitur in Hippolyto ; item in Œdipode : Sit precor dixisse tutum uisu et aspectu horrido
90
Sénèque utilise le même en trois endroits dans Hippolyte91 ; de même dans Œdipe : Sit precor dixisse tutum uisu et aspectu horrido, où d’autres lisent souvent de façon erronée praetor pour precor, substituant tuum à tutum, puisque cela porte sur un seul mot, où je considérerais plus vraie la leçon : Sit precor dixisse tutum etc. dont le sens sera : « je prie qu’il soit sûr de m’avoir dit… »
Creon enim nondum recepta mentis sanitate uix putat locum sibi esse securitati, quapropter aliquantulum temporis petit sibi dari quo deposita formidine quae enarraturus est forte minus Œdipodi placitura tutius enarret quod sole liquidius sequentia demonstrant.
Créon effectivement n’ayant pas encore repris ses esprits a du mal à concevoir qu’il y ait de la place pour sa sécurité ; c’est pourquoi il demande qu’un petit peu de temps lui soit accordé, pour que, une fois sa crainte abandonnée, les choses qu’il doit lui raconter par hasard à Œdipe, qui lui plairont moins, il pût les lui raconter en étant plus en sécurité, ce que démontrent les mots suivants plus nettement que le soleil :
Vt sacrata templa Phoebi supplici intraui pede
92
Vt sacrata templa Phœbi supplici intraui pede (« Quand je pénétrai les temples consacrés de Phœbus d’un pas suppliant »), c’est ainsi vraiment qu’il me paraît bon de lire, non ut sacra templa (« quand les temples sacrés »), comme on lit dans tous les manuscrits de façon défectueuse et fausse.
Idem carminis genus in Medea habetur : uos precor uulgus silentum uosque ferales deos
93
Poena grauior sedeat coniugis socero mei
94
Il y a le même type de vers dans Médée : uos precor uulgus silentum uosque ferales deos (« je vous implore, foule silencieuse et vous, dieux des morts »), à la suite duquel se trouve ce vers défectueux et mutilé Poena grauior sedeat coniugis socero mei (« qu’un châtiment plus lourd soit fixé pour le beau-père de mon époux »), où nous insérons à ce qui a été brûlé, aussi convenablement que les meilleurs lecteurs l’auront vu.95
Huius carminis sic pedes ut ex nostro Seneca colligere possumus distribuuntur :
Les pieds de ce vers, comme nous pouvons le conclure d’après notre Sénèque, sont ainsi distribués :
Prima sedes trocheo tribracho anapesto et aliquando dactilo munietur ; secunda tribracho trocheo spondeo et dactilo ; tertia tribracho et trocheo ; quarta trocheo et spondeo ; quinta trocheo et dactilo ; Sexta spondeo ; septima trocheo ; octaua uero unicam continebit sillabam.
La première position sera occupée par un trochée, un anapeste et parfois un dactyle; la deuxième par un tribraque, un trochée, un spondée et un dactyle ; la troisième par un tribraque et un trochée ; la quatrième par un trochée et un spondée ; la cinquième par un trochée et un dactyle ; la sixième par un spondée 96; la septième par un trochée ; mais la huitième contiendra une syllabe unique.
Vnde carmen catalecticum manebit huius Terentianus sic meminit:
D’où le vers restera catalectique, ce passage de Terentianus le rappelle ainsi :
97
Ex his patet quis uersus trochaicus pro cuius cognitione, si quis faciliori praecepto uelit insistere, pro fronte ponat creticum, id est amphimacrum cuius prima et tertia longae secundam circumcingant breuem ; cuius si prima in duas breues dissoluatur, ad peona quartum transeat ; si tertia longa in duas breues ad peona primum, quo deinde sublato amphimacro secundum sillabas aut aliquando tempora uersus iambicus trimeter ponatur, cuius natura per haec quae praeposuimus sunt nota, et haec de trocheico.
De ces vers découle clairement quel vers trochaïque pour la connaissance duquel, si l’on veut s’arrêter à un principe assez facile, il place un crétique au début, c'est-à-dire un amphimacre99, dont la première et la troisième, longues, entourent une deuxième, brève ; pied qui, si la première se résout en deux brèves, devient un péon quatrième ; si la troisième longue se résout en deux brèves, devient un péon premier100 ; et ensuite l’amphimacre ayant été supprimé, le vers iambique est disposé comme un trimètre en fonction des syllabes ou parfois des mores 101, dont la nature, à travers ce que nous avons proposé ainsi que les remarques à propos du trochée, ont été notées ; et voilà pour le trochée.
Quid autem trocheus cum iambo temporibus equiualeat iambicum non ingrediatur carmen ex Terentiano sic dicente cognoscetur :
Or en quoi le trochée équivaut à l’iambe par ses mores, mais en quoi il n’entre pas dans le vers iambique, on l’apprendra à partir de Terentianus, s’exprimant ainsi :
102
Est praeterea tertium genus carminis sapphicumque ex lectione horatiana uel semidoctis satis tritum nunc praetermittendum, nisi pauculae difficultates forsitan legentium animos remoraturae nobis sese obtulissent ;
Il existe en outre un troisième type de vers, le sapphique, assez traité après la lecture d’Horace ou par des amateurs, qu’on devrait omettre à présent, si de toutes petites difficultés devant peut-être retarder l’esprit des lecteurs ne nous y avaient pas obligé ;
inter has occurrit sapphicum illud cum
anapesto in prima sede habeat nec ulla dominetur aula
104
parmi celles-ci intervient ce sapphique avec un anapeste en première position : habeat nec ulla dominetur aula.
Quem locum reformans tollat apposuit Paulus Crosnensis insignis Academiae Cracosmensis poeta clarissimus ut ex codice Lucii Ioannis Noctuini patria pruteni uiri cum doctrina tum moribus singularissimi collegimus.
Et corrigeant ce lieu, Paweł Krosneńczyk, remarquable poète très célèbre de l’Académie de Cracovie105, ajouta tollat comme nous l’avons relevé à partir d’un manuscrit de Lucius Johannes Noctuinus106, de Prusse, homme exceptionnel tant par sa science que par ses mœurs.
Vnde tuto legi poterit tollat ulla nec
dominetur aula : in his autem carminibus misit infestae Troiae ruinis non semel arcus
107
Pelion regnum Protheo superbum
108
D’où on peut lire sans risque tollat ulla nec dominetur aula ; or dans ces vers misit infestae Troiae ruinis non semel arcus et de même Pelion regnum Protheo superbum, Bernardinus109 expose en effet qu’il lui paraît plus juste qu’il y ait une synérèse, parce que par une autre figure, une longue étant résolue en deux brèves, comme nous le voyons parfois se produire chez Virgile, quand par contraction une diction de trois syllabes se résout en deux syllabes ou plusieurs syllabes se résolvent en un nombre plus réduit (de syllabes).
Quartum genus carminis est anapesticum dimetrum quod ab his « euripidium » ab aliis « pindaricum » dicitur ; repetitur tamen « anapesticum », aliquando sic impressum ut trimetri formam habeat ad monometrum uel dimetrum reducibile.
Le quatrième type de vers est le dimètre anapestique, qui est appelé par les uns « euripidéen », par les autres « pindarique » ; on le trouve cependant appelé « anapestique », parfois imprimé de telle façon qu’il a la forme d’un trimètre, réductible à un monomètre ou à un dimètre.
Huius prima sedes anapesto, unde sumit nomen, dactylo et spondeo nonnumquam tribracho conceditur; secunda spondeo anapesto et aliquando tribracho.
Sa première position est accordée à l’anapeste, d’où il tire son nom, au dactyle, au spondée, parfois au tribraque ; la deuxième au spondée, à l’anapeste, et parfois au tribraque.
Si uero ulterius prodeat quod monometro
idem dimetro continget. Alii iambum admittunt quod necessario uiderint, suumque hoc
carmine iudicium fulciunt iam Cadmeis inclita Bacchis aspera die diumeta rubent
110
Mais si, plus avant, apparaissait un pied qui conviendrait au monomètre, qu’il convienne également au dimètre. D’autres admettent l’iambe, chose qu’ils auront vue nécessairement, et ils soutiennent leur jugement par ce vers iam Cadmeis inclita Bacchis aspera die diumeta rubent, lieu que nous annotons, dont nous avons dit que Baccis Cathmeis plaisait à bien des gens et qu’ajouter asperaque die, dont le sens est « les buissons célèbres par leurs Bacchantes Cadméiennes rougissent en un jour âpre lui aussi » ; mais si nous examinons la chose à fond, une autre solution apparaîtra, de loin plus adaptée, pour qu’on lise aspersa die, dont le sens sera évident même pour un enfant.
Est quintum genus glyconicum, spondeo et
dactylis duobus, aut spondeo, coriambo et pyrrhico constans ; Bernardinus etiam interpres non incuriosus hoc
esse glyconicum carmen fata si liceat mihi
111
Il y a un cinquième type, glyconique, se composant d’un spondée et de deux dactyles, ou d’un spondée 112, d’un choriambe et d’un pyrrhique ; Bernardinus Marmitta, commentateur qui n’est pas le moins soigneux, va même jusqu’à dire que fata si liceat mihi est un vers glyconique113.
Est aliud asclepiadeum.
Il y a un autre vers, l’asclépiade.
Item alia quaedam uaria choris maxime
admixta ut in Hippolyto : fugit insanae similis procellae
114
De même il y a certains autres vers variés, mélangés aux chœurs surtout, comme dans Hippolyte : fugit insanae similis procellae, où les sapphiques sont liés aux adoniques et asclépiades115.
Sunt etiam alia a Francisco Nigro « alcmania » uocata quae a Terentiano dicuntur « bucolica », quorum exempla subdensa ait :
Il y a mêmes d’autres vers appelés « alcmaniens »116 par Francesco Nigro117, que Terentianus dit « bucoliques », dont il cite des exemples assez nombreux :
118
Illud autem lasciue nemorum dee
120
imbriferumque Caurum
121
Or ce vers : Lāscī / vāe nĕmŏ / rūm dĕĕ est un glyconique 122 , suivi d’un dimètre choriambique heptasyllabique123, tel īmbrĭfĕrūm / quĕ Cāurūm 124.
Circa regna sonat
125
Circa regna sonat est un dimètre archiloquien hypercatalectique, constitué de deux pieds. 126
In Œdipodis dithyrambo reperiet diligentissimus quisque hexametros uersus trocheicos, anapesticos, dimetros et monometros cata / acata / hypercatalecticos alcmaniis sapphicisque insertos.
Dans le dithyrambe d’Œdipe les plus attentifs trouveront des hexamètres trochaïques, anapestiques, des dimètres et monomètres catalectiques, acatalectiques, hypercatalectiques, insérés dans des alcmaniens et des sapphiques.
In Medea
uero Quonam cruenta Maeneas
127
Toutefois dans Médée, Quonam cruenta Maeneas est un dimètre anacréontique catalectique.128
paeona fieri perspicis pedem in fine : epitritus nam primus implet hanc partem, breuis locata cum sit ante tres longas.
dum pes secundus quartus et novissimus semper dicatus uno iambo serviat: nam nullus alius ponitur, tantum solet temporibus aequus non repelli tribrachys.
(« Déjà les buissons, qui doivent leur nom aux Bacchantes cadméennes, rougeoient, inondés de sa lumière » Traduction F.-R. Chaumartin pour la CUF). Avec aspersa die, préféré par Heinsius, on a bien un spondée au P1.Iām Cād / mēīs / īnclŭtă / Bācchīs Āspēr / să dĭē / dūmē / tă rŭbēnt