Aegidius Maseriensis Iacobo de Molendino perspicacissimo sacrae theologiae professori uigilantissimoque Gymnasii Bonorum Puerorum pastori, salutem
Aegidius Maserius

Présentation du paratexte

Gilles de Maizières, l’éditeur, adresse une longue dédicatoire à Jacques du Moulin, professeur au Collège des Bons Enfants, également destinataire du chœur des Bons Enfants, que l’on trouve juste après. Dans ce qui s’apparente à une note d’intention, de Maizières explique qu’il veut rendre accessible l’auteur latin et sa poésie. En légitimant son entreprise éditoriale, qui semble avoir été au cœur de vifs débats, il prépare aussi la tâche du professeur, à la disposition duquel il met un livre de qualité s’adressant aux étudiants de tous niveaux.

Bibliographie :
  • Philippe Renouard, Imprimeurs et libraires parisiens du XVIe siècle, 1 ; 2, pubPlace, publisher, date, p. 129, 470, 502.
  • Philippe Renouard, Bibliographie des impressions et des œuvres de Josse Badius Ascensius, imprimeur et humaniste, 1462-1535. Tome 3, date
  • Paré-Rey, Pascale, "Les éditions des tragédies de Sénèque conservées à la Bibliothèque nationale de France (XVe-XIXe s.)", in L’Antiquité à la BnF, 17/01/2018, https://antiquitebnf.hypotheses.org/1643
  • Paré-Rey, Pascale, Histoire culturelle des éditions latines des tragédies de Sénèque, 1478-1878, Paris, Classiques Garnier, « Histoire culturelle » 20, 2023
Traduction : Pascale PARE-REY

Aegidius Maseriensis Iacobo de Molendino perspicacissimo sacrae theologiae professori uigilantissimoque Gymnasii Bonorum Puerorum pastori, salutem

Gilles de Maizières à Jacques Du Moulin, professeur de théologie sacrée3 des plus pertinents et surveillant des plus attentifs du Collège des Bons Enfants, salut

Ea est, puto, non ultima praeceptoris cura, uir dignissime, ut optimum librum eumdemque emendatissimum suis exhibeat discipulis.

Ce n’est pas, je pense, le dernier souci d’un précepteur, cher homme des plus dignes, que de présenter une œuvre excellente et en même temps un texte parfaitement établi à ses élèves 4.

Nam si, ut recte Quintilianus praecipit, ab optimis est inchoandum 5, nonne in iisdem perseuerandum, et tandem (si ulla quies studiis debetur) in optimo fine quiescendum ?

Car si, comme Quintilien l’a recommandé à juste titre, il faut commencer par les meilleurs, ne faut-il pas continuer à étudier les mêmes, et enfin (s’il doit y avoir un arrêt dans les études) s’arrêter à cette élite ?

Prodest enim quibusuis optimi libri lectio, siue tiro sit siue doctiusculus aut doctrina sublimiori euectus in eo qui uersatus sit.

La lecture d’un excellent livre profite en effet à n’importe qui, que celui qui s’y penche soit débutant ou assez instruit ou bien encore porté par un assez grand savoir.

Sed quemadmodum in uita magnae aestimationis uirum expedit omni uitio esse defaecatum, ne eius exemplo reliqui ad male uiuendum inuitentur, ita quoque hic summopere conducere arbitror auctorem spectatum emunctissimum atque omnibus mendis (si fieri potest) castigatissimum tuis legendum proponi.

Mais de même que dans la vie il importe qu’un homme tenu en grande estime soit purifié de tout vice, pour que les autres ne soient pas incités à mener une mauvaise vie en suivant son exemple, de même ici aussi, je pense qu’il est très avantageux que l’auteur examiné soit proposé comme parfaitement purifié et expurgé de toutes les fautes (si c’est possible) pour le faire lire à tes élèves6.

Vt enim illius acta etiam mala imitari dubitauit nemo (nam quod ab eo proficiscuntur, bona creduntur), ita quae ab eius promptuario defluunt dicta quamquam inelimata lectores ipsos imitationis admodum studiosos non sine legentium iactura in errorem foedissimum trahere consueuerunt.

Car, de même que personne n’a hésité à imiter y compris les mauvaises actions d’un grand homme (et en effet, comme elles émanent de lui, on les croit bonnes), de même les paroles qui sortent de son magasin, même si elles manquent de poli, ont souvent entraîné, non sans dommage pour ceux qui lisent, des lecteurs eux-mêmes parfaitement désireux de tirer vers l’erreur la plus laide.7

Cum itaque lectioni quae in ipso festorum limine nostris publica fieri consueuit, pro tua singulari beniuolentia, me quantumuis indignum praefecisses, essetque Ouidii poetae ingeniosissimi Metamorphosis (quam nunc absoluimus) proxime finem deducta, facillimum mihi fuit successorem dignum illi designare Lucium Annaeum Senecam, numquam satis laudatum poetam, meo sane iudicio, inter primos numerandum, quam successionem tibi probatum iri facile confidebam, quippe qui optime noram te non minori studio litteraturam quam rectos iuuenum mores exposcere.

C’est pourquoi, comme tu me confiais, en vertu de ta bienveillance singulière – alors que je n’en étais pas digne – la leçon qu'on a l’habitude de professer publiquement devant les nôtres au seuil même des festivités8, et comme elle avait été conduite pour les Métamorphoses du merveilleux poète Ovide presque jusqu’à la fin (et nous l’avons maintenant achevée), il m’a été très facile de lui désigner comme successeur Lucius Annaeus Sénèque9, poète qui n’a jamais été assez reconnu à mon avis vraiment, qu’il faut compter parmi les premiers auteurs, succession dont j’étais assuré que tu l’approuverais facilement, moi qui savais parfaitement que tu exigeais avec une ardeur aussi grande la culture lettrée que des bonnes mœurs chez les jeunes gens.

Atqui nullus poeta id aeque praestare potest atque hic noster Seneca 10.

Assurément, aucun poète ne peut se distinguer autant que notre cher Sénèque que voici.

Nam praeter sublimem scribendi charactera, carminis grauitatem, rationis uenustatem, inuentionis subtilitatem, denique mouendorum affectuum mirabilem quasi quamdam necessitatem, philosophicis praeceptis recteque uiuendi normis scaturire cernitur, adeo ut ea de causa potissimum, quamquam dissentiente temporum ratione, a plerisque non differre ab eo Seneca creditus sit quem Stoicorum facile principem 11 libera Roma praeferre Neroni12 (ut ait Iuuenalis) non dubitasset ; quem propter morum uitaeque integritatem beatus Hieronymus, non plebeiae censurae homo, sanctorum catalogo (ut multorum probat auctoritas) pie inseruisset. 13

En effet, outre le caractère sublime du style, la gravité de la poésie, la beauté de la composition, la finesse de l’invention14, enfin une sorte de force impérieuse admirable dans l’expression des passions, on le voit abonder en préceptes philosophiques et en normes de vie droites15, au point que, à cause de cela surtout, bien que l’argument de la chronologie plaide le contraire, la plupart des gens ont cru qu’il ne différait pas de ce Sénèque, principal représentant des Stoïciens, qu’une Rome libre n’aurait pas hésité à préférer à Néron (comme dit Juvénal) ; lui que, en raison de l’intégrité de ses mœurs et de sa vie, Saint-Jérôme, homme au jugement distingué, avait religieusement intégré dans son catalogue des saints (comme l’autorité de beaucoup l’approuve).

Sed de hoc alias.

Mais on parlera de cela ailleurs.

Habemus ergo auctorem egregium huicque negotio quod paramus accommodatissimum.

Nous avons donc un auteur remarquable et parfaitement adapté au travail que nous entreprenons.

Nam cum nostra haec lectura et grammaticis et almis philosophiae alumnis (quos artistas uocant) sit communis illis nitor orationis, his uero philosophiae praecepta ex hoc libro perinde ac uberrimo torrente manantia satisfacient, neque illa utrosque nouisse paeniteat.

Car puisque notre cours16 est commun aux grammairiens et aux enfants nourris à la philosophie17 (qu’on appelle "artiens"18) et aux bons élèves de la philosophie (qu’on appelle artistes), les premiers se satisferont de la splendeur19 du discours, les seconds des préceptes philosophiques qui coulent de ce livre comme d’un torrent abondant ; et peut-être que ni les uns ni les autres ne regretteront ce savoir.20

Nam et grammaticum probitas et philosophum maximopere decet eloquentia.

Car la probité ne messied pas du tout au grammairien, ni l’éloquence au philosophe.

Verum quae una superest cura multo difficillima est : ut integerrimus in manus scholasticorum ueniat, eius siquidem carmina sunt usque adeo taetris oppleta uitiis ut quodam quasi cancere uideantur deformata, nullamque ideo carminum speciem prae se ferentia, cui morbo nisi ocius occurratur ne pars necessario trahenda ueniat timendum est, idque contingat quod in Terentio factum uidemus ut, qui prius sincero esset carmine scriptus, corrupta sit prosa legendus.

Mais la plus grande difficulté, de loin, reste de faire parvenir aux mains des étudiants un Sénèque rendu à son intégrité, si vraiment sa poésie est à ce point remplie de laideurs qu’elle semble déformée comme par quelque chancre et ne présente pour cette raison aucune apparence de poésie ; or pour cette maladie, sauf si l’on s’y attaque assez rapidement, on risque de devoir amputer un membre et de voir arriver ce qu’on a pu observer à l’égard de Térence, qu’un texte écrit en vers purs doive être lu dans une prose corrompue.

At dicet quis sero medicinam parari 21 , nam (ut aiunt) pharmaca nascenti sunt adhibenda malo22 ; cui libere respondeo medicinam sero nobis quidem parari posteris in tempore.

Mais l’on dira que « le remède est préparé trop tard » ; car (comme on dit) « c’est dès la naissance du mal qu’il faut appliquer des médicaments » ; à quoi je réponds franchement que le remède est certes préparé trop tard pour nous, mais à temps pour la postérité.

Quid parari ? audebone hunc sanandum suscipere ? qua fiducia id facere praesumam ?

‘Préparé’, vraiment ? Aurai-je l’audace d’entreprendre de le soigner ? quelle est ma légitimité pour le faire ?

Grauissima est procul dubio prouincia tum ob ipsius morbi naturam, qui si ulla ratione curari potuisset huic tam pio operi minime defuissent tot tamque praestantes uiri quibus hoc nostrum saeculum affluit, tum propter inuidos obtrectarores.

Notre charge est, sans nul doute, on ne peut plus lourde, d’une part en raison de la nature de ce mal – si on avait pu le soigner par quelque moyen, il n’aurait pas manqué d’hommes pour cette œuvre si pieuse, si nombreux et si prestigieux, dont notre siècle abonde – d’autre part à cause de la jalousie des critiques.

Nam quomodocumque in ea re me gessero illis oblatrandi relinquetur locus ; si quidem aliquid immutauero non esse tanti auctoris litteram corrumpendam inclamabunt ; sin omnia reliquero immutata, qui morbus sanari poterit ?

Car de quelque manière que je me serai comporté dans cette affaire, ils auront l’occasion d’aboyer ; si assurément j’ai changé quelque chose, ils clameront qu’on ne doit pas changer un iota d’un si grand auteur ; mais si au contraire je laisse tout sans rien changer, comment la maladie pourra-t-elle être traitée ?

Quo fit ut propemodum desistam ; silentiique praemium postulans me uictusque uolensque remittam nisi me tui misereat languentis poeta philosophie 23aut philosophie poeta.

D’où il se fait que j’abandonne presque ; réclamant un prix pour mon silence, je m’avouerai volontiers vaincu, si je n’avais pitié de toi 24, qui serais tout abattu, « poète philosophe » ou « philosophe poète ».

Libet enim te tali titulo decorare.

J’ai plaisir en effet à te donner ce titre.

Faciet profecto istaec tui miseratio ut me ipsum supra uires effundam, idque impigre adtentem cuius exitus non est mihi satis perspectus, necdum de te spem abieci omnem.

Cette pitié que j’ai de toi fera donc que je me déploierai au-delà de mes forces et que je m’attaquerai sans attendre à quelque chose dont l’issue ne m’est pas vraiment transparente, mais je ne désespère pas encore de toi complètement.

Nam quod nullus huc usque tibi medicatus est aut laboris fuga aut animi ad aliam rem deflexio aut indignius tui fortasse contemptus effecit.

Car si personne ne t’a jusqu’ici soigné, c’est le fait soit d’un refus de travailler soit d’une attention portée à autre chose soit d’un mépris vraiment indigne à ton égard.

Non audeo tamen tibi integram promittere sanitatem, ceterum illud unum polliceor me omnem tibi impensurum operam ; si prospere cedat (quod fore confidimus), te tibi studiosisque restituto gratias merebimur.

Je n’oserai cependant pas te garantir une santé entière ; du reste je promets seulement que je te consacrerai toute mon activité ; si elle trouve une issue heureuse (et nous sommes confiants que ce sera le cas), après t’avoir rendu à toi-même et aux savants, nous mériterons de la reconnaissance.

Sin contingat infelicius (quod deus auertat) facile dabis ueniam.

Mais si le résultat est moins favorable (que dieu nous en préserve), tu me pardonneras facilement.

Prodesse enim paratus, accessi Solonis industriae ; non immemor qui (ut Diogenes Laertius inprimo recitat), sollicitus parumne tacens rei publicae consuleret, an consulens caput in discrimen adduceret se uerius aliis quam sibi, natum apertissimo probauit argumento 25  ; neque inuiduli 26 idcirco ut triumphantes exultent, Icariam eructantes temeritatem – nam magnis ausis excidisse nonnullis laudi datum est – cui non incommode illud accedit : Quodsi deficiant uires audacia certe laus erit ; in magnis et uoluisse sat est 27 .

Car prêt à rendre service, je me suis avancé en me souvenant de l’activité de Solon ; ce dernier (comme Diogène Laërce surtout ne cesse de le dire), ne sachant si, en se taisant, il prendrait de bonnes décisions pour l’État ou si, en délibérant, il mettrait sa vie en danger, administra la preuve formelle qu’il était né pour les autres plutôt que pour lui-même ; et que les petits envieux n’exultent pas comme s’ils triomphaient, exhalant une témérité digne d’Icare (car à quelques grandes entreprises on a accordé l’éloge), à qui cette pensée ne messied pas : « Mais si les forces me font défaut, du moins louera-t-on mon audace ; dans les affaires importantes, il suffit d’avoir eu ne serait-ce que la volonté ».

His rabularum conuiciis nihil praeter Διονος Υμυ, respondendum duco.

À ces injures de critiques enragés28, je considère qu’il ne faut pas daigner répondre un traître mot29.

Insuper ut ad te redeam, oculatissime nostri gregis pastor, tuus imprimis fauor bene sperare monet, quo me uersus inclinante nihil non est sperandum, sub cuius oculis mihi dulcis labor, cuius nomine, ut Palladis aegide tectus, Aegidius caninos liuidorum morsus non reformido, qui forte (ut uerbis utar gelianis ) leues, futiles, loquacesque magis quam facundi30 et (ut expressius dicam) loquentes non loquentes illud taeterrimum uirus insano de pectore exgurgitare non uerebuntur, aliis medens, at ipse uulneribus scatens, quibus, seuerissime uitiorum supplantator, Perseos clipeum obiicies, aut ad L. Cassii tribunal trahendos iubebis nil igitur cunctandum ratus, institutum opus aggrediar te duce carpens uiam eo iucundiorem mihi futuram quo istud gymnasium Parisiis Bonorum Puerorum coetui primitus fundatum tua singulari prouidentia, qua ceteris longe praestas ad antiquum bene uiuendi morem redactum, antiquam recipiat lecturam.

En outre, pour revenir vers toi, surveillant ô combien perspicace de notre troupe, c’est ta faveur surtout qui me conduit à avoir bon espoir, car en me tournant en sa direction, il n’est rien qu’on ne doive espérer, faveur sous les yeux de laquelle mon labeur est doux, sous le nom de laquelle, comme couvert par l’égide de Pallas, moi, Aegidius (Gilles)31, je ne redoute pas les morsures canines des jaloux, eux qui (pour me servir des mots d’Aulu-Gelle), légers, futiles, bavards plus qu’éloquents et (pour le dire plus concisément) parlants sans parler, n’auront pas honte de vomir de leur poitrine malsaine ce poison hideux, réparateur pour les uns, mais regorgeant lui-même de blessures, auxquels toi, pourfendeur des vices le plus intransigeant, tu opposeras le bouclier de Persée ou jugeras qu’il faut les traîner devant le tribunal de L. Cassius 32 pour qu’ils y soient jugés, estimant qu’il ne fallait donc avoir aucune hésitation, je m’attaquerai à l’ouvrage commencé sous ta houlette, en me saisissant d’une voie qui me sera d’autant plus agréable que ce Collège fondé à l’origine pour le rassemblement des Bons Enfants de Paris 33, grâce à ta providence remarquable, par laquelle tu l’emportes de loin sur tous les autres pour renouer avec l’antique façon de vivre honnêtement, ce Collège donc retrouve la lecture antique.

Si quid autem in textu uel extra textum puerile emergat, ignoscas, quaeso ; uolui profecto forte nimium pueriliter cum tuis pueris semel puer agere, alias superis aspirantibus quae senis erunt dicturus.

Si quelque chose ressort dans le texte ou hors du texte qui soit puéril, pardonne-moi, je t’en prie ; j’ai voulu assurément, peut-être de façon trop puérile, me conduire une fois comme un enfant avec tes chers enfants, mais autrement avec des aspirants plus avancés, dans l’intention de leur tenir des propos dignes d’un vieillard.


3. Il s’agit davantage, sans doute, de la discipline que de la référence en une Maîtrise en Sacrée Théologie ou Sacrae Theologiae Magister (STM), titre honorifique décerné par l'Ordre des Dominicains.
4. Commence ici un parallèle entre philologie et morale qui parcourra tout le texte.
5. Quint., I.O. 10.1.46.. Igitur ut Aratus ab Ioue incipiendum putat, ita nos rite coepturi ab Homero uidemur, où Quintilien commence à évoquer les auteurs latins, en parallèle aux auteurs grecs déjà cités, susceptibles d’aider à la formation de l’elocutio du futur orateur.
6. Le parallèle prend maintenant la forme d’une analogie terme à terme entre la correction philologique et la pureté morale d’une part, et entre l’homme et son œuvre d’autre part.
7. Parallèle (ut… ita…) entre l’inuentio (imitari) et l’elocutio (dicta).
8. On ici un témoignage très intéressant de la pratique d’une leçon inaugurale, confiée à un professeur de prestige, pour un auditoire composé d’élèves, avant que le texte ne soit expliqué par le professeur habituel en titre.
9. De Maizières veut montrer que Sénèque a autant de valeur qu’Ovide et va développer divers arguments en faveur de ce nouvel auteur qu’il veut traiter, rapprochant par là sa dédicace de la partie laudative (laus) composant les praelectiones.
10. Tert., Anim. 20.1.. Y a-t-il un jeu avec Tertullien : Seneca saepe noster dans cette appropriation marquée par le possessif ? c’est possible, mais c’est peut-être aussi une simple façon de mentionner l’auteur sur lequel le cours va porter.
11. Cic., Nat. 2.3.5.. L’expression principem Stoicorum fait-elle jeu de mots avec le princeps Néron ? Il semble que non, car elle se trouve chez Cicéron quand il mentionne les premiers fondateurs de la Stoa ; il préfère cependant un pontife et un augure romain à n’importe lequel de ces « premiers » Stoïciens : Cic., Nat. 3.2.5 : Scipionem P. Scaevolam pontifices maximos, non Zenonem aut Cleanthen aut Chrysippum sequor, habeoque C. Laelium augurem eundemque sapientem quem potius audiam dicentem de religione in illa oratione nobili quam quemquam principem Stoicorum. L’expression a ici à la fois un sens chronologique et de préséance. Dans notre paratexte, seul ce second sens est possible et ne redouble pas forcément de connotation politique.
12. Juv., Sat. 8.210-211. Libera si dentur populo suffragia, quis tam / perditus ut dubitet Senecam praeferre Neroni ? « Si on donnait le droit de vote au peuple, Qui serait assez enragé pour hésiter préférer Sénèque à Néron ? » (traduction CUF).
13. Hier., Vir. Ill.. Jérôme a inclus le philosophe dans son catalogue des écrivains chrétiens, De uiris illustribus, en grande partie sur la base de la croyance en la correspondance (en réalité apocryphe) entre Saint-Paul et Sénèque, et a souligné l’affinité entre les doctrines stoïcienne et chrétienne (Hier., Is. 4.11 ; PL 24.147.nostro dogmati in plerisque concordant).
14. Même s’il n’y a pas de systématisme dans l’emploi des termes, on reconnaît l’éloge de l’elocutio (sublimem scribendi caractera), de la dispositio (rationis uenustatem) et de l’inuentio (inuentionis subtilitatem).
15. Outre les qualités formelles, de Maizières mentionne les atouts de la pensée de Sénèque le Dramaturge, qui ont conduit à son identification avec Sénèque le Philosophe et à sa christianisation.
16. La lectura désigne la lecture interprétative, la lectio dont il était question plus haut l’acte de lire, le plus souvent en public, c’est-à-dire la leçon au sens pédagogique du terme.
17. Remarquer les termes rares, l’image et les jeux de sonorité.
18. Étudiants de la faculté des arts, comprenant les deux catégories d’étudiants.
19. Nitor est un terme technique; voir Scaliger, Poetices, 4.1, dans la partie consacrée à la saphèneia d'Hermogène (ou claritas d'après son traducteur Georges de Trébizonde) : non omnibus Latinae linguae probum ac uerum usum, paucis eius vim ac rationem notam esse. Itaque in oratione cum dicis esse nitorem splendoremue, de uerbis uerborumque compositione clara atque illustri intelligas, quae lecta collocataque lucem quandam emittant ad eundem modum quo et arma ipsa detersa uel situ uel rubigine.
20. On retrouve l’alliance des qualités formelles et intellectuelles.
21. Erasme, Adagia 140, Erasme rapporte la source de Satius est initiis mederi quam fini à Thgn., El. 1134 et cite le même locus chez Ov., Rem. 91-92 et Pers., Sat. 3.63-64, avant d’expliquer la teneur de la pensée.
22. Pensée proverbiale, déjà citée par Érasme et mentionnée dans de vieux recueils, comme le De arte sermocinandi ou Hortulus carminum selectorum sive De arte sermocinandi in omni consortio, docte, et lepide, de qualibet materia: carminibus heroïcis, et distichis cum magna sententiarum varietate, adagiorum, et epigrammatum. In gratiam studiosorum, et carminum amantium. Christus dat finem libro ; pietasque coronat : prima dabit mundum, meta secunda polum. Insuper accedit, sub finem amplissimus index, Perez, de, Arta y Loyola, Joseph [Auteur restitué d'après le colophon], Bruxelles, 1683, p. 91, sous l’entrée morbus ; ainsi que dans les Fragmenta poetarum veterum recentiorumque, ponderosioribus metris, cum laudi, cum vituperio inservituris: nec non intermixtis apophtegmatibus, axiomatibus, variis in- et descriptionibus, sententiis, ac documentis, sacris, atque profanis, interjectisque…, Josephus Ernestus Barisien, Prague, J. Kaudelkin, 1747, p. 252.
23. Le terme est écrit avec une abréviation assez obscure ; nous proposons cet adverbe que l’on rencontre une seule fois (occurrence elle-même douteuse) chez Cic., A. 1.8, en lieu et place de philosophice.
24. De Maizières commence à s’adresser directement à Sénèque, et continuera pendant quelques phrases.
25. DL., Vie de Solon 49-50. καὶ οὐ μόνον, ἀλλὰ καὶ βοηθεῖν ἕτοιμος εἶναι, λέγων ταῦτα· ἄνδρες Ἀθηναῖοι, τῶν μὲν σοφώτερος, τῶν δὲ ἀνδρειότερός εἰμι· σοφώτερος μὲν τῶν τὴν ἀπάτην Πεισιστράτου μὴ συνιέντων, ἀνδρειότερος δὲ τῶν ἐπισταμένων μέν, διὰ δέος δὲ σιωπώντων. Καὶ ἡ βουλή, Πεισιστρατίδαι ὄντες, μαίνεσθαι ἔλεγον αὐτόν· "Il fit plus : il déclara qu’il était prêt à combattre dans l’intérêt public. « Athéniens, dit-il, je suis ou plus sage ou plus courageux que vous ; plus sage que ceux qui ne voient pas les menées de Pisistrate, plus courageux que ceux qui les connaissent et que la crainte rend muets.» Mais l’assemblée, dévouée à Pisistrate, le traita d’insensé." Et : Ἤδη δὲ αὐτοῦ κρατοῦντος οὐ πείθων ἔθηκε τὰ ὅπλα πρὸ τοῦ στρατηγείου καὶ εἰπών, « Ὦ πατρίς, βεβοήθηκά σοι καὶ λόγῳ καὶ ἔργῳ, » "Lorsque Pisistrate se fut emparé du pouvoir, Solon refusa de se soumettre et déposa ses armes devant le tribunal des stratèges en s’écriant : « ö ma patrie, j’ai mis à ton service et ma parole et mon bras! »"
26. Le terme n’est pas classique, mais se trouve dans le lexique d’Hoven, p. 296 : « inuidulus, -i: un « petit » envieux / a “small” envious person ; dim. de inuidus. »
27. Prop., El. 2.10.5-6. Sentence clôturant le distique des vers Prop., El. 2.10.5-6 : quod si deficiant uires, audacia certe / laus erit: in magnis et uoluisse sat est.
28. Il s’agit de la canina facundia, rapportée par Érasme, Adagia, 1334 aux modes de vie et façon de parler des Cyniques ; voir Ar1586_Frischlinus_p1 in castigandis forensibus rabulis et nugis ac nebulis sophisticis et Ar1607_Christianus_p1 a nefando rabula.
29. Littéralement « qu’il ne faut rien répondre de plus que le gru de Dion ». Expression devenue proverbiale, mentionnée dans [Plutarque], De proverbiis Alexandrinorum, 29 τὸ τοῦ Δίωνος γρῦ: οὗτος ὁ Δίων Ἀλεξανδρεὺς μὲν ἦν τὸ γένος, διαβόητος δὲ ἐπὶ φιλοσοφίᾳ, ἔχων ἀδελφὸν παλαίστην Διονύσιον, †Τόψιον ἐπικαλούμενον. λοιδορούμενος δ’ ὑπό τινος τῶν ἀνταγωνιστῶν αὐτοῦ καὶ ἀκούων ῥητὰ καὶ ἄρρητα καίτοι πολλοῦ παρακολουθοῦντος ὄχλου αὐτὸς μὲν οὐδὲν ἐφθέγξατο κατεσταλμένος τὸ τῆς φιλοσοφίας παράγγελμα τηρῶν·ἐντὸς δὲ τοῦ ἰδίου πυλῶνος γενόμενος καὶ μηδὲν ὀργῆς (5) ὑποφήνας εἶπε πρὸς τὸν νεανίαν ‘οὐδὲ γρῦ’. ὁ δὲ ἀθυμήσας ἀπήγξατο. εἴρηται δὲ καὶ παρὰ τοῖς Ἀττικοῖς τὸ γρῦ [καὶ] ἐπὶ τοῦ μικροῦ καὶ τοῦ τυχόντος. καὶ γὰρ τὸν ἐν τοῖς ὄνυξι ῥύπον λέγουσι γρῦ καὶ γρυτάρια τὰ κατὰ τὴν οἰκίαν λεπτὰ σκευάρια καὶ γρυτοπώλην τὸν τὰ σκευάρια πωλοῦντα. L’expression se retrouve dans deux Adages d’Érasme : Erasme, Adagia, 703 Ne gry quidem (qui comprend la phrase : Prorsum nihil respondet, ac ne gry quidem, “En outre il ne répond pas même un grognement”, c'est-à-dire rien du tout) et cite Ar., Pl. 17 à l’appui de cette expression : καὶ ταῦτ’ ἀποκρινόμενος τὸ παράπαν οὐδὲ γρῦ ; Erasme, Adagia, 739 , Dionis gry, qui comprend la référence à Dion : Σὸ Δίωνος γρῦ, id est Dionis gry. Recte dicetur, aut ubi quempiam magno animo contemnimus ac ne responso quidem dignum habemus aut cum rem nihili significamus. Nam de gry alio diximus loco. Adagium ortum ex eventu. Dion, Alexandrinus natione, praecipuam in philosophia laudem est consecutus. Huic erat frater luctator, nomine Topsius. Itaque cum quidam ex eius concertatoribus Dionem probris incesseret fanda atque infanda in eum evomens multa interim turba ad convicium, ut fit, affluente ipse ne verbo quidem respondit maledictis, videlicet philosophiae dogmatum memor. Ceterum ubi jam intra aedium suarum vestibulum esset, – nam conviciator eo usque fuerat prosecutus – nihil iracundiae prae se ferens hoc tantum respondit οὐδὲ γρῦ, id est ne gry quidem. Juvenis autem animi impotens laqueo se praefocavit. Ea res in vulgi fabulam abiit.
30. Gell., Noct. 1.15.1. Quam inportunum uitium plenumque odii sit futtilis inanisque loquacitas et quam multis in locis a principibus utriusque linguae uiris detestatione iusta culpata sit. Qui sunt leues et futtiles et inportuni locutores quique nullo rerum pondere innixi uerbis uuidis et lapsantibus diffluunt, eorum orationem bene existimatum est in ore nasci, non in pectore; linguam autem debere aiunt non esse liberam nec uagam, sed uinclis de pectore imo ac de corde aptis moueri et quasi gubernari.
31. Jeu de mots entre aegis, idis, f, égide et Aegidius, prénom de l’auteur du paratexte.
32. Lucius Cassius Longinus Ravinna, tribun en 137, consul en 127, censeur en 125, et nommé juge spécial en 113 dans l’affaire des Vestales : alors qu’une première condamnation ne touchait qu’une des Vestales, Ravinna condamna à mort les deux autres ainsi que d’autres personnes impliquées. Sa sévérité légendaire fit qu’on surnomma les juges rigides Cassiani et son tribunal « l’écueil des accusés ».
33. Il ne s’agit pas de celui de Reims, mais d’un des deux Collèges de Bons-Enfants parisiens, celui fondé en 1208 près de la Collégiale saint-Honoré ou celui dit de Saint-Victor, fondé en 1257.